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« Pour nous, cette particularité, c'est lui. Elle n'est pas dissociable de notre fils. »

sommes allés voir une théra- peute conjugale. Mon conjoint était réticent, c’est donc seule que j’ai suivi les deux premières séances. Puis il m’a rejoint pour les trois suivantes. Nous avons pu discuter de la surdité de Ra- phaël, de notre exaspération ré- ciproque. Poser les chosesnous a fait dubien. Nous avons toujours considéré Raphaël comme nor- mal, avant même qu’il soit ap- pareillé. Aujourd’hui, il est plein de vie et très dégourdi. Mais son père appréhende sa première rentrée, les railleries des autres élèves. Raphaël est conscient qu’il est atteint de quelque chose

de particulier. Mais pour nous, cette particula- rité, c’est lui. Elle n’est pas dissociable de notre fils. Lui sait qu’il serait différent sans ses appa- reils. Il a heureusement dépassé le stade où il passait son temps à les retirer pour les mettre dans sa bouche ! Aujourd’hui, fini le stade oral. Après les avoir enlevés, pour dormir notam- ment, ou dans le bain, il nous les réclame. Au réveil et en sortant de l’eau. A la piscine et à la plage, pas d’appareils non plus. S’il est en co- lère, si le bruit l’agace, il arrive qu’il les retire. S’ils sont bouchés ou si les piles sont usagées, il nous les passe pour révision.Mais il les garde lorsqu’on le gronde. Je sais que Raphaël va s’en sortir. Son ORL a confiance dans ses progrès fu- turs. Oui, certains sports lui seront interdits et certaines maladies infectieuses pourraient ruiner tous nos efforts, et nous ne devons pas relâcher notre vigilance. Mais je suis certaine qu’il se battra toujours pour éviter le pire. Il nous donne vraiment une leçon de vie.

Je voudrais souligner un point capital: après le premier test auditif, obligatoire à la maternité, il faut instaurer un suivi. Je pense à tous ceux qui n’ont pas les ressources nécessaires face à cet accompagnement, ou pas laforce.Desmamansdémunies,desparentsmal conseillés, n’emmènent parfois leur enfant chez l’orthophoniste qu’à 3 ans… Avec les lourdes conséquences que l’on imagine. En tout cas, si parmalchanceilnepeutêtreappareillé,ilnefaut jamais penser que tout est perdu. On peut l’ac- compagner de bien des manières, qu’il s’agisse de la lecture labiale ou du langage des signes. Je suis prête à avoir un deuxième bébé, mais il faut passer par des tests génétiques parce que nous ne voulons pas d’un deuxième enfant ma- lentendant. Ce serait trop lourd en termes d’organisation. S’il s’agit d’un gène isolé, aucun risque. Donc, nous hésitons. Je suis confiante, mon conjoint l’est moins. On laisse Raphaël évoluer. Mais je ne suis pas prête à faire le deuil d’un deuxième enfant. l PROPOS RECUEILLIS PAR JESSICA BUSSAUME

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ILLUSTRATION LADYBUG

PARENTS Janvier-Février 2019 67

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