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www.regal.fr RÉGAL N° 88 MARS AVRIL 2019

Chez Katz’s Delicatessen, les murs sont couverts de photographies de visiteurs célèbres qui viennent d’abord pour le sandwich au pastrami.

KATZ’S FAIT DE LA RÉSISTANCE Les fans du film Quand Harry rencontre Sally se souviennent de la scène culte de l’orgasme simulé au restaurant. Elle a été tournée chez Katz’s Delicatessen, dans le Lower East Side. Cette institution de la cuisine juive new-yorkaise, née en 1876, est le symbole de la résistance à la pression immobilière (elle refuse de déménager), et à l’e-monnaie, en vogue dans le quartier. Ici, on paie cash. La machine tourne à plein régime, presque jour et nuit. On débite le pastrami (viande de bœuf saumurée et fumée) à la chaîne dans de robustes sandwiches servis avec de plantureux cornichons. Et on expédie des saucissons dans tout le pays.

gués. Aux premiers rayons de soleil, ils cèdent le pavé aux vendeurs de bagels et de café brûlant. Puis vien- dra le tour des hot-dogs tandis que dans les diners, on envoie les omelettes nanties de leurs tranches de bacon craquant. À l’heure du thé, les tables gastronomiques accueillent déjà leurs premiers clients, et le coup de feu ne se calmera qu’après 23 heures. RÉSEAUX SOCIAUX VS NEW YORK TIMES « Si je compare à la fin des années 1980, quand j’ai débarqué, il y a eu une révolution culinaire dans cette ville », souligne le chef Éric Ripert, né sur la Côte d’Azur. Son restaurant, Le Bernardin, sacré meilleur restaurant du monde par le classement La Liste (à égalité avec Guy Savoy) a pignon sur la 55 e , non loin de Broadway et des studios de télévi- sion. Le fond de la salle est tapissé d’une immense vague hypnotique (peinte par l’artiste Ran Ortner). L’assiette l’est tout autant et chaque bouchée, ciselée et précise, est un voyage sur les océans. La langoustine pêchée la nuit précédente par un petit bateau au large du Massachu- setts est la vedette américaine de ce déjeuner étourdis- sant. « Il y a une culture du produit de plus en plus aiguë. Les New Yorkais sont des gourmands exigeants et de vrais connaisseurs », remarque Éric Ripert. Dans une ville où tout n’est que compétition, le moindre relâchement est immédiatement sanctionné. Les réseaux sociaux sont autant craints que les papiers du critique gastrono- mique du New York Times. « Les réussites peuvent être fulgurantes, les chutes encore plus rapides » , constate Dominique Ansel. Ce pâtissier d’origine picarde, et qui a acquis la nationalité américaine, n’en revient toujours pas. Mais sa fabuleuse histoire ne lui est pas monté la tête, et son sourire est aussi gourmand que ses kouign amann à la mode new-yorkaise, légers et croustillants. t

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