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Les signes religieux sont nombreux sur les murs des maisons du quartier. Est-ce pour s’opposer aux ouvriers limougeauds, qui, eux,

préfèrent la réunion syndicale à la messe dominicale ?

petit village d’Astérix qui résiste encore et toujours à l’envahisseur, avec une potion : la religion, ana- lyse Michel Toulet. Les bouchers sont très pieux et conservateurs, alors que Limoges, ouvrière, était de gauche et plutôt indifférente à l’Église. » Confirmation par ces nombreuses niches dans les façades abritant des statues religieuses. Et, surtout, au milieu de la rue des Bouchers par une placette qui accueille une drôle de petite chapelle construite au xiv e siècle par la confrérie des Bouchers pour accueillir les reliques de saint Aurélien, deuxième évêque de Limoges et leur patron. Dominée par un clocher au toit de châ- taignier, cette chapelle de corporationmérite une visite : à l’intérieur, un groupe sculpté doté d’une vierge qui porte dans ses bras l’enfant Jésusman- geant un rognon ! « Vendue comme bien national à la Révolution, la chapelle a été rachetée par les Bouchers. C’est aujourd’hui une chapelle privée ouverte aux cultes publics, la confrérie y perpé- tue le culte à saint Aurélien, assure l’entretien, le chauffage… » , explique Michel Toulet, lui-même membre de la confrérie. TOUT LE MONDE SE CONNAÎT Si les bouchers ont quasiment disparu – au siècledernier, l’extensionde laville lescontraint à se déplacer pour trouver les clients – l’esprit de quartier est resté fort. « Ici, tout le monde se connaît, c’est un village » , apprécie l’artiste- peintre François Peyrout, figure de la rue qui s’inspire des lieux pour ses toiles. « Avant, j’étais dans la boucherie, maintenant, je suis peintre au couteau », dit-il. Un libraire, un antiquaire, des restaurants renommés, des bars ont pignon sur rue aujourd’hui. Surtout, le charme du quartier a attiré un grand nombre d’artisans d’art : une créa- trice sur porcelaine, une autre de bijou, un atelier

Philippe Roy / Détours en France x 2

Le troisième vendredi du mois d’octobre, les rues du quartier sont investies par les fines gueules. La Frairie des Petits Ventres accueille des milliers de gourmands, qui viennent déguster les spécialités des boucheries et de charcuteries limousines.

spécialisé en dorure à la feuille, des artistes sur mosaïques… Les commerçants se sont regroupés sous le slogan « I love rue de la Boucherie », des- tiné à faire revenirmassivement les Limougeauds ici. Chaque troisième vendredi dumois d’octobre, l’endroit continue en tout cas d’attirer desmilliers de gourmands pour la Frairie des Petits Ventres, devenue une institution depuis son instauration en 1973. Dans une ambiance bon enfant et convi- viale, on y déguste tripes, galetous, girot, fraise de veau, boudin aux châtaignes, tandis que Notre- Dame-des-Petits Ventres est portée en procession dans la ville. Comme si la traditionbouchère conti- nuait… La plupart des membres de la Confrérie Saint-Aurélien sont aujourd’hui des descendants des grandes familles de bouchers. ‡

www.detoursenfrance.fr / avril 2016 / numēro 190

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