Lettres à Divakar jusqu'à 2005

Note de Divakar, écrite en 2010.

Il semble bien que cette lettre ait été la dernière que Colette put m’écrire.

Le 8 avril suivant, 2005, la veille de ma fête, Colette est « partie ».

C’était avant l’aube ; nous étions seuls tous les deux dans l’atelier du 14, elle repliée en « chien de fusil » sur son lit le long du muret, moi allongé sur le divan parallèle aux grandes baies vitrées, à angle droit, tout près d’elle. Je venais de m’endormir un moment. La soirée avait été dure et longue et tardive ; Colette avait fini par téléphoner à Olga pour lui décrire les symptômes qu’elle ressentait – symptômes classiques de l’approche d’une crise cardiaque/pulmonaire – et Olga lui avait confirmé sans aucune hésitation que, effectivement, c’était la fin. Olga avait répondu en tant que médecin et amie. Mais en tant que très proche amie et sœur et fille de Colette, avec tout l’intense attachement qui la liait à elle, elle avait pensé qu’il s’écoulerait encore un peu de temps (peut-être un ou deux jours) et qu’elle serait auprès de Colette, comme moi, quand viendrait l’heure. Colette était extrêmement inconfortable, aux prises avec ces douleurs et sensations pénibles, la densité du malaise et la déception presque violente de se trouver ainsi réduite et incapable de se réunir en paix et en harmonie. Il lui était presque impossible de localiser une position du corps qui lui donnerait un peu de répit, et elle était habitée par cette énergie sans âge qui ne pouvait accepter cette condition. Quelques heures plus tôt, pourtant, elle avait pu, ayant repris un peu de souffle, noter à haute voix qu’elle était « bouleversée par l’accueil que Mère me fait… », révélant

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