Journal C'est à Dire 116 - November 2006

S P É C I A L A R T I S A N A T

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Les ambitions d’un cyber-artisan La menuiserie Bertin à Nods réa- lise depuis cette année 80 % de son chiffre d’affaires sur Internet. Une révolution technologique à laquelle l’artisanat, traditionnel par excellence, n’échappera pas selon le dirigeant Marc Bertin. Nods

S on grand-père, ancien maire de Gil- ley, était scieur. Son père et son oncle gèrent une grosse scierie dans le Haut- Doubs. Sa mère est technicienne à l’O.N.F., son beau-père garde-forestier et ses autres grands-parents étaient menuisiers. Et pour- tant, allez savoir pourquoi, Marc Bertin a choisi de suivre des études… d’ingénieur en informatique. Mais le jeune entrepreneur sera vite rat- trapé par son virus du bois. “L’informatique, ce n’est pas pour toi” se dit-il très vite. Après s’être aguerri à plusieurs métiers - menui- sier, métreur, plombier, commercial dans une entreprise du bâtiment… -, il reprend au début de l’année l’entreprise d’Yves Cour- tois à Nods, spécialisée dans la charpente et la couverture. Au fil des ans, la société s’était peu à peu spécialisée dans la fabri- cation et la vente de mobilier urbain et déco- ratif en bois - bancs, clôtures, barrières, piquets, abris, bacs à fleurs, abribus…Depuis un an et demi, le dirigeant avait pris le vira- ge Internet en créant un site spécialisé et surtout, en référençant ses produits dans tous les liens Internet. Il suffit de taper le terme “mobilier urbain” sur un moteur de recherche et on tombe aisément sur le site www.sa-courtois.fr. Bingo, la stratégie paie : à son lancement, le site reçoit la visite d’une vingtaine d’in- ternautes par jour. Début 2006, 150 visi- teurs naviguent sur l’adresse de la menui- serie Courtois, ils sont plus de 300 aujour- d’hui. Marc Bertin a vite intégré ce filon.

Marc Bertin a repris l’entreprise Courtois en janvier dernier. Il a déjà doublé le chiffre d’affaires.

“Nous réalisons 80 % de notre activité par Internet, nous livrons des clients dans tou- te la France. Je prévois prochainement d’étendre mes exportations vers l’Angle- terre où j’ai déjà des contacts” se félicite le jeune dirigeant. Le chiffre d’affaires de l’entreprise a fait un bond : il est passé de 300 000 euros à plus de 600 000, et l’année n’est pas terminée. L’entreprise réalise la moitié de son chiffre avec les particuliers, toujours plus friands d’aménagements exté- rieurs, le reste de l’activité étant assurée par les collectivités publiques et les entre-

prospection” avoue-t-il. Le jeune homme a eu aussi l’opportunité de reprendre une entreprise en bonne san- té. “Je tire un coup de chapeau à M. Cour- tois qui, même dans les derniers temps, a toujours continué à investir dans ses outils de production. Je reprends une entreprise équipée au top. C’est une des clés de la réus- site d’une transmission dans l’artisanat” ajoute Marc Bertin. Le potentiel de développement de son entre- prise, il le pense énorme. “Le bois est la matière de l’avenir, estime-t-il. Quand on

Reprise-transmission Le 52 ème “Proforéa” signé ce mois-ci L’ idée de se lancer dans la reprise d’une entreprise dont le gérant est sur le point de partir en retraite est sédui- sante. Mais de l’idée à sa réalisation, il y a parfois un fos- sé que certains repreneurs potentiels ont du mal à franchir. Pour passer de l’idée à sa concrétisation, la Chambre de Métiers du Doubs propose un dispositif innovant : Proforéa (program- me de formation à la reprise d’entreprises artisanales). “L’ob- jectif de ce programme est que le repreneur potentiel puisse tester son projet de reprise sur le terrain, explique Virginie Ches- sel, chargée de la transmission à la Chambre. Grâce au dis- positif, le repreneur va bénéficier d’un statut de stagiaire de la formation professionnel. S’il est demandeur d’emploi, il sera rémunéré pendant cette phase qui s’étale de 4 à 12 mois. En même temps, la Chambre de Métiers donnera au repreneur des formations théoriques à la gestion d’entreprise.” Le stage Proforéa est assorti de 80 heures de formation au minimum pour une session de 12 mois. La Chambre de Métiers a signé mi-novembre le 52 ème Profo- réa depuis que le dispositif a été mis en place en 1998. “Il y en a environ toujours une dizaine en même temps” ajoute la res- ponsable. Preuve que le dispositif est justifié, 50 % des for- mations Proforéa aboutissent à une reprise d’entreprises. “Cela montre bien que la personne qui aura suivi le stage aura fait un vrai choix à l’issue de la formation.” Sur le territoire franc-comtois, entre les années 2000 et 2005, 994 transmissions-reprises d’entreprises ont été accompagnées au total. “Ce qui fait 2 213 emplois sauvegardés ou créés” annon- ce la Chambre.

prises. “Ceux qui apparaissent sur la première page d’Internet dans la rubrique mobilier urbain, le leur vend mes produits, j’ai ainsi une vingtaine de distributeurs par cet intermédiaire. Internet, c’est vrai- ment une toile commerciale que

sait que 10 % seulement des cmai- sons se font en bois aujourd’hui, il y a un réel potentiel. Nous nous inscrivons pleinement dans ce dyna- misme de la filière bois.” Rien ne pourra arrêter les ambitions de Marc Bertin. Prochainement, il pré-

Reprendre une entre- prise en bon- ne santé.

l’on tisse. C’est un outil qui révolutionne le commerce. Il y a dix ans, on avait le bottin, aujourd’hui, c’est Internet” ajoute Marc Ber- tin. Cette façon de travailler est si por- teuse que l’entrepreneur n’a pas de réseau commercial. “Je n’ai même plus à faire de

voit de racheter un dépôt en Bretagne pour conquérir le marché anglais. Parallèlement, il lance de nouveaux produits dont il pres- sent le développement futur : les murs anti- bruit. Toujours en bois, naturellement. J.-F.H.

U ne transmission d’en- treprise, ça ne s’im- provise pas, quel que soit le secteur d’ac- tivité dans lequel l’artisan évo- lue. Aussi traditionnel soit-il. La société de nettoyage La transmission, une affaire qui se prépare La transmission de son entreprise, on ne la traite ni au hasard, ni au dernier moment. Ce constat vaut même pour les métiers les plus traditionnels. Exemple à Morteau. Morteau

Aumaître est installée à Mor- teau depuis 1975. Son créateur, Maxime Aumaître, a orienté son activité vers “tout ce qui est surface vitrée.” Il entretient et nettoie ainsi écoles, com- merces, banques et également les habitations des particuliers. À l’époque où il s’est lancé, il n’y avait aucune concurrence dans ce secteur d’activité. Aujourd’hui, on dénombre en Franche-Comté quelque 150 entreprises positionnées sur le nettoyage, dont 70 rien que sur Besançon. Dans le Haut-Doubs, elles sont désormais plusieurs à se par- tager le marché. La concurrence, Maxime Aumaître l’a accueillie avec sérénité. “L’arrivée de ces nouvelles entreprises, ça ne m’a pas gêné, affirme l’artisan. Les entreprises de nettoyage qui se sont créées se sont surtout positionnées sur le secteur indus- triel. Moi, j’ai conservé mon cré- neau de départ : les particuliers et les petits commerces.” Maxime Aumaître arrive aujourd’hui à l’âge de la retrai- te. Dans ce contexte concur- rentiel, il paraissait inespéré de pouvoir remettre son affai- re. Et pourtant, le repreneur, il l’a trouvé. La reprise d’en- treprise, c’est avant tout une histoire d’affinités et de flair. Didier Chabrat reprendra offi- ciellement l’affaire le 2 janvier prochain. Riche d’une expé- rience d’une dizaine d’années dans le nettoyage sur le secteur de Besançon, le salarié a fait les frais d’un licenciement éco-

nomique. La cinquantaine pas- sée, retrouver un emploi sala- rié relève aujourd’hui du par- cours du combattant. Didier Chabrat a donc pris son bâton de pèlerin, en quête d’une entre- prise à reprendre. Il entame parallèlement une formation de 600 heures à la gestion d’en- treprise, puis contacte Maxime Aumaître, qu’il avait connu

de passer le témoin en douceur. En janvier prochain, Didier Chabrat rependra seul la bar- re de l’entreprise. Si l’activité se maintient et se développe, le repreneur envisage “l’em- bauche d’un collaborateur.” Didier Chabrat est bien conscient que dans ce métier traditionnel, il sera aussi néces- saire d’innover. C’est pourquoi

quelques années aupa- ravant. Quelques mois plus tard, il concréti- se son projet de repri- se. “On s’est contacté en janvier dernier. À

il songe déjà à “créer peut-être une deuxiè- me structure le moment venu - “C 6 Net service” - qui s’adresserait uni-

“Créer peut-être une deuxième structure.”

partir de mars, j’ai entamé les démarches administratives, puis rencontré les banques, sollicité un prêt d’honneur départe- mental, etc.” raconte Didier Cha- brat qui vient de créer l’en- treprise “C 6 Net”. Depuis plusieurs semaines, le cédant et le repreneur visitent ensemble les clients, histoire

quement aux particuliers dans le cadre de la politique actuel- le de développement des services à la personne. L’idée est d’ob- tenir un agrément pour entrer dans le dispositif des chèques- emplois universels” confie le repreneur.

Maxime Aumaître, à gauche, passera le témoin à son successeur Didier Chabrat, en janvier prochain.

J.-F.H.

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