LA CRISE DE LA CRIMINALITÉ ENVIRONNEMENTALE - page 97

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Conclusion
Le commerce illégal d’espèces sauvages a des conséquences environnementales, sociétales,
et économiques : il représente notamment une menace pour la sécurité, affecte la subsis-
tance des communautés locales et entraîne le vol du capital naturel à l’échelle nationale.
Parce qu’il implique un ensemble complexe d’éléments – mauvaise gouvernance environ-
nementale, non-réglementation du commerce, vides juridiques et systèmes de blanchi-
ment utilisés au profit de la criminalité – il affaiblit les institutions de l’État et les entre-
prises légitimes et représente par conséquent un obstacle au développement durable.
Le commerce illégal d’espèces sauvages affecte de nombreuses
espèces et essences. Le rythme, la complexité et l’envergure
internationale de la criminalité forestière et du trafic d’espèces
sauvages vont bien au-delà des capacités individuelles de
nombreux pays ou organisations. Le commerce illégal d’espèces
sauvages constitue non seulement une forme de criminalité
très répandue, sur fond de criminalité organisée, de violence
et de terrorisme, mais aggrave également la pauvreté et fragi-
lise le développement et la gouvernance. Il est important de
noter l’implication croissante des réseaux criminels transnatio-
naux dans le commerce illégal des espèces sauvages et du bois,
ainsi que l’impact significatif de ces actes sur l’environnement
et le développement durable. L’examen des tendances actuelles
suggère d’accorder en priorité l’attention au commerce illégal
de charbon de bois et d’autres produits ligneux (dont le papier,
le bois d’œuvre et la pâte à papier ainsi que les essences fores-
tières de grande valeur en voie de disparition, telles que le palis-
sandre, le prunier d’Afrique et l’acajou) et au commerce illégal de
produits issus de mammifères emblématiques (notamment les
tigres, les éléphants et les rhinocéros) et de nombreuses autres
espèces, dont les requins, les raies manta et l’esturgeon pour n’en
citer que quelques-uns. À cet égard, la CITES continue à faire
autorité dans le domaine du contrôle et de la surveillance de ce
commerce.
Les mesures de lutte contre ce commerce doivent tenir compte
des caractéristiques spécifiques et communes des différentes
chaînes d’approvisionnement et reconnaître que celui-ci est
alimenté en premier lieu par la demande des consommateurs.
Pour être efficace, la lutte contre les impacts économiques,
sociaux et environnementaux du commerce illégal d’espèces
sauvages doit cibler à la fois l’offre et la demande et s’appuyer sur
la dissuasion, la transparence, la mise en place et l’application de
textes juridiques explicites, la modification des comportements et
le développement de moyens de subsistance alternatifs. Pour ce
faire, les acteurs nationaux et internationaux devront être pleine-
ment impliqués dans le processus, notamment dans les secteurs
de l’environnement, de l’application des lois et du développe-
ment, mais aussi de la sécurité et du maintien de la paix.
De nombreux engagements forts ont été récemment pris à
l’échelle nationale et régionale concernant de nombreux aspects
du commerce illégal d’espèces sauvages. Il est aujourd’hui
nécessaire d’entamer une action immédiate, décisive et collec-
tive afin de concrétiser ces engagements (tels que ceux prévus
dans les accords multilatéraux sur l’environnement et pris par les
agences des Nations Unies). Le renforcement de la législation, la
conformité et la sensibilisation environnementales et l’appui aux
agences d’application de la loi sont indispensables pour mettre
fin au financement des groupes armés et du terrorisme grâce au
commerce illégal des espèces sauvages (en particulier le charbon
de bois).
Les efforts d’application de la loi doivent être renforcés et s’ac-
compagner d’actions plus larges en faveur du développement
et de la sensibilisation des consommateurs. Il est nécessaire
de poursuivre l’analyse des marchés des utilisateurs finaux, de
concevoir, soutenir et mettre en œuvre systématiquement des
campagnes de sensibilisation et d’identifier d’autres produits
pouvant remplacer ceux issus d’espèces sauvages relevant du
commerce illégal. La société civile et le secteur privé ont un rôle
essentiel à jouer dans tous ces domaines.
Dans le cadre de l’action mondiale contre le commerce illégale
d’espèces sauvages, l’ONU doit élaborer une stratégie globale et
coordonnée afin de soutenir le travail des pays sur tous les fronts.
Cela permettrait, avec le concours du secteur de l’application de
la loi, d’améliorer la coordination des initiatives en faveur de la
cohérence de la législation, du droit de l’environnement, de l’éli-
mination de la pauvreté et l’aide au développement, de la sensi-
bilisation des consommateurs et de la réduction de la demande.
L’appui de la communauté des donateurs internationaux et bila-
téraux sera essentiel afin de reconnaître et combattre la grave
menace que représente le commerce illégal d’espèces sauvages
pour le développement durable, et de soutenir les actions natio-
nales, régionales et mondiales en faveur de la mise en œuvre,
du respect et de l’application de mesures ciblées de lutte
contre ce commerce. Il est notamment urgent d’investir dans
des campagnes de réduction de la demande, ainsi que dans la
formation et l’appui technologique aux agences nationales d’ap-
plication de la loi afin de leur permettre de mieux protéger les
espèces menacées par le commerce illégal. Ces mesures doivent
s’accompagner d’efforts constants visant à renforcer la gestion
de l’environnement au sens large et favoriser le développement
durable.
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