Journal C'est à dire 217 - Janvier 2016

P O L I T I Q U E

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L’homme de la présidente Malgré son ancienne profession d’avocat, Christian Dufay se tient volontiers éloigné des mondanités et des obligations liées à la charge de son épouse, première fem- me élue présidente de la toute nouvelle Bourgogne-Franche-Comté. Le mari de Marie-Guite Dufay

L e 4 janvier, dans la tri- bune réservée au public qui venait assister à l’élection deMarie-Guite Dufay à la tête de la nouvelle Région Bourgogne-Franche-Com- té, le cœur d’un homme palpi- tait sans doute plus que tous les autres. C’est une des rares fois où on le verra dans une enceinte poli- tique. Car il n’est pas du genre à courir les salons dorés ou les inaugurations aux côtés de son épouse. Le rôle de faire-valoir ou pire, celui de potiche ou de second rôle, très peu pour lui. Christian Dufay préfère à l’arène politique vraie fierté” que Christian Dufay a ressentie. “Je suis heureux pour elle, heureux de la voir bien dans son personnage, équilibrée, fidè- le à elle-même” dit-il sobrement. Avec la nouvelle vie de son épou- se-présidente qui l’amènera à passer trois jours par semaine sur Dijon ou Paris dans le cadre de ses responsabilités, Christian Dufay devra apprendre à com- poser. “Je sais que j’irai quel- quefois la retrouver à Dijon. Mais ses nouvelles responsabilités ne dont son épouse est familière, les jardins plus secrets de ses pas- sions pour les choses de la nature.Mais ce jour- là, c’est bien sûr “une

d’aujourd’hui” confie M. Dufay qui se débrouille également très bien en ski de randonnée sur les massifs jurassiens ou alpins. Parmi les occupations qui lui prennent des week-ends entiers figure aussi une activité pour laquelle il s’est pris de passion : la réhabilitation des terrasses et des murs en pierres sèches, témoins du passé viticole de Besançon. Dans leur terrain de Bregille, avec l’association “Ter- rasses des collines bisontines et d’ailleurs”, il a remonté pierre après pierre avec des amis béné- voles, plusieurs terrasses. “Ça devient pour moi une petite pas- sion avoue cet homme dont la frêle corpulence ne laisserait pas deviner qu’il est capable de soulever des tonnes de caillou dans une journée. Une fois qu’on a remonté un mur, on voudrait que toutes les collines de Besan- çon soient concernées par ces opé- rations de réhabilitation.” Si lui-même avoue qu’il n’avait guère pris le temps, trop occu- pé par son métier d’avocat, de s’occuper de leurs trois enfants quand ils étaient petits (Nico- las l’aîné travaille aujourd’hui dans le commerce bio, Caroline est artiste dans le Lubéron et Emmanuelle, magistrate à Mar- seille), il prend aujourd’hui un

vont pas m’empêcher de conti- nuer à faire ce que je faisais jusque-là” note M. Dufay. Depuis qu’il a vendu en 2010 les parts dans son cabinet d’avocats de la rue de la Préfecture à Besan- çon, Christian Dufay peut consa- crer une bonne part de son temps aux causes associatives qui lui sont chères. Jusqu’à juin der- nier, il était le président du Gare- B.T.T., une association d’insertion bisontine. Il est toujours vice- président de l’association d’aide aux victimes d’infractions (A.A.V.I.). Il s’implique égale- ment dans la Caisse solidaire, mois, il garde la maison gérée par l’association “Les Invités au festin”, un établissement qui accueille des personnes défi- cientes mentales. Son équilibre, il le trouve également dans les randonnées en haute montagne dont il est passionné - il a à son actif plusieurs sommets de plus de 6 000 mètres d’altitude à tra- vers le monde. “En 1973, Marie- Guite et moi avons fait le G.R. 20 en Corse, à une époque où les infrastructures n’étaient pas celles une structure qui octroie des micro-cré- dits aux personnes qui ne peuvent pas pré- tendre à un prêt clas- sique. Et une nuit par

Christian Dufay, sur le terrain de la maison familiale à Besançon, sur les hauteurs de Bregille.

réel plaisir à garder ses petits- enfants. “J’espère aussi que Marie-Guite aura l’occasion de dégager un peu de temps pour voir ses petits-enfants” souffle- t-il. Christian Dufay ouvre aujour- d’hui une nouvelle étape de la vie de couple qu’il forme avec Marie-Guite, sa cadette de quatre ans qu’il avait rencontrée à Sciences Po. Bachelière à 16 ans, la future élue régionale avait obtenu son diplôme de sciences politiques très jeune, à tout jus- te 19 ans. 45 ans après leur mariage célébré à Montluçon, ville où son père médecin exer- çait, Marie-Guite s’est créé un destin, marche après marche. Élue une première fois auprès de Robert Schwint en 1989, puis conseillère déléguée en 1995, elle devient adjointe aux affaires sociales de Jean-Louis Fousse-

ret lors de son premier mandat en 2001. Cette proche de Pau- lette Guinchard a tenté de lui succéder en tant que députée en 1997. Ce fut l’échec, cuisant. Mais le destin l’a rejointe à la faveur du décès de Raymond Forni en 2008 qu’elle a remplacé au pied levé à la présidence de la Région Franche-Comté. On connaît la suite : réélection en 2010 face à Alain Joyandet, puis ce récent succès en Bourgogne- Franche-Comté que peu d’observateurs de la vie politique prédisaient. “Marie-Guite n’est pas une ambitieuse mais elle a su s’imposer. Et une fois qu’elle a accepté un challenge, elle fait tout pour le réussir. C’est une femme qui a une carapace plus solide encore que ce qu’on pou- vait penser” analyse son mari. Le jour du second tour, pendant que son épouse suivait le dérou-

lement de la journée à Dijon, son nouveau fief, lui était un des assesseurs du bureau de vote de Bregille-village, là où le couple vote. “Elle avait mal vécu les résultats du premier tour, elle a donc attendu que ce soit offi- ciel pour me téléphoner et me fai- re part de son succès. Je l’ai sen- tie très émue” raconte-t-il. Dans cette nouvelle vie où c’est elle l’élue super-active et lui le retrai- té, le couple Dufay a trouvé ses marques. Même s’il peut regret- ter encore que dans les moments où ils continuent à s’octroyer des moments d’évasion, en randon- née par exemple, Marie-Guite ne puisse pas s’empêcher de lais- ser son téléphone allumé… “Elle est trop sérieuse…” glisse Chris- tian dans un sourire bienveillant teinté d’une pointe d’admiration. J.-F.H.

“Marie-Guite n’est pas une ambitieuse.”

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