Quelle ville?

Une alternative à ces deux causes incompatibles et à leur affrontement s’était pourtant constituée, composée de personnes qui n’avaient pu se résoudre à soutenir les vues étroites de la Société mais ne pouvaient moralement adhérer aux positions que S. et ses adhérents avaient prises : les « neutres ». Harassées et méprisées par les uns, cultivées et propitiées par les autres, ces individualités très distinctes étaient devenues, par la force de l’ostracisme, relativement solidaires : ce fut ainsi que, lorsque O., le premier administrateur effectif délégué par le Gouvernement central, eut identifié tous les protagonistes en place, il conseilla à ces « neutres » de former une Association légale les regroupant, afin de prévenir leur éviction.

Ce qu’ils firent.

Ce n’est qu’en 1988, lorsque l’Acte de Parlement fut voté, confirmant le rôle du Gouvernement et ses responsabilités dans la destinée de Sa ville, qu’une liste officielle de tous les résidents fut établie, incluant les « neutres » : la clôture d’un long chapitre corrosif – parfois drôle ou ridicule, souvent dévastateur.

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C’était comme si, pendant plusieurs années, le territoire psychologique de Sa ville avait été pris en otage, ou frappé d’un sortilège – et il fallait désormais se reprendre, tenter de se retrouver, et de retrouver le mouvement d’une quête commune.

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