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COMMUNE SUISSE 1 l 2017
POINT FORT: RÉFORME DE L’IMPOSITION DES ENTREPRISES III
cantons disposent ainsi de la marge
de manœuvre pour compenser la baisse
des taux de l’impôt sur le bénéfice. L’ACS
demande par contre que les villes et les
communes doivent aussi en profiter et
qu’elles soient étroitement associées à
la mise en œuvre de la RIE III.
Le Parti socialiste (PS) a lancé le référen-
dum contre la RIE III, c’est pourquoi le
peuple suisse se prononcera aux urnes
le 12 février 2017. En amont, Roger Nord-
mann, conseiller national, président du
groupe du PS, et Frédérique Reeb-
Landry, présidente du Groupement des
Entreprises Multinationales (GEM),
croisent les arguments pour et contre la
RIE III dans un débat contradictoire.
«Commune Suisse»: Monsieur Nord-
mann, cela fait des années que les
Suisses savent que les statuts fiscaux
spéciaux doivent être abolis. Mainte-
nant que le Parlement s’apprête à le
faire, votre parti s’y oppose. Qu’y a-t-il
de si choquant dans cette réforme?
Roger Nordmann:
Sur le principe, la cor-
rection que la Suisse doit faire sous la
pression de l’étranger est juste et néces-
saire. En effet, tous les types de bénéfice
doivent être traités sur un pied d’égalité.
Ce qui est profondément choquant par
contre, c’est que le Parlement suisse a
dénaturé cette réforme pour aboutir fi-
nalement à 3 milliards de francs de
pertes. Il va donc falloir couper dans les
prestations sociales ou augmenter les
taxes ou les impôts pour les personnes
physiques pour boucher ces trous. C’est
la classe moyenne qui va payer le coût
de cette réforme.
Le nouveau système d’imposition ne
peut pas être aussi favorable que l’ac-
tuel. On devait forcément s’attendre à
des pertes fiscales.
Nordmann:
Il est vrai qu’on ne peut pas
éviter complètement des pertes fiscales.
Mais c’est une raison de plus pour être
rigoureux dans le calcul. En contrepartie
d’une baisse du taux de l’imposition des
bénéfices, il faut prendre en compte tous
les revenus des entreprises, sans intro-
duire de nouvelles astuces qui vont, une
fois de plus, permettre à certaines
d’entre elles de payer beaucoup moins
que d’autres malgré un bénéfice iden-
tique.
Qui, d’après vous, profitera de la ré-
forme?
Nordmann:
Ce sont plutôt les moyennes
et les grandes entreprises qui payent un
impôt sur le bénéfice, les petites n’ayant
que peu de bénéfice comptable, car le
patron se paye souvent sous la forme de
salaire. Plus les entreprises sont grosses,
plus elles pourront bénéficier de ces
astuces. La différence de traitement est
particulièrement frappante en ce qui
concerne la déduction des intérêts
notionnels. Celle-ci permet aux entre-
prises de déduire un intérêt calculatoire,
donc fictif, sur les fonds propres excé-
dentaires. Pour les entreprises actives
sur le marché intérieur, le taux appli-
cable sera celui des obligations de la
Confédération, qui est actuellement à
zéro. Donc pour les PME, même si elles
font un bénéfice, cet instrument ne rap-
porte rien. Pour les entreprises dont la
vocation est de prêter de l’argent à des
sociétés mères, sœurs ou filles par
contre, c’est le taux effectif à l’intérieur
du groupe qui pourra être appliqué pour
calculer les déductions. Pour ces der-
nières, le taux peut être de 3, 4 ou 5%,
et la différence de traitement est cho-
quante.
Choquante? Est-ce que vous partagez
cet avis, Madame Reeb-Landry?
Frédérique Reeb-Landry:
Cette réforme
est tout simplement nécessaire pour que
la Suisse puisse se mettre au diapason
avec les règlements au niveau interna-
tional. La Suisse s’est engagée à élimi-
ner les statuts cantonaux qu’on a connus
jusqu’à présent. La version qui a été
présentée par le Conseil fédéral et adap-
tée par le Parlement est, à mon avis,
équilibrée et fédéraliste. Elle tient
compte des besoins des 26 cantons, car
en matière d’économie, chaque canton
a sa spécificité. Cette réforme constitue
une boîte à outils qui va permettre à
Est-ce que le citoyen paiera les frais de la
RIE III ou va-t-il plutôt en profiter? Les avis
divergent.
Photo: Stämpfli AG
Frédérique
Reeb-Landry
Frédérique Reeb-Landry est prési-
dente du Groupement des Entre-
prises Multinationales (GEM), basé à
Genève.