COMMUNE SUISSE 6 l 2015
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ASSOCIATION DES COMMUNES SUISSES
Oui à FORTA
L’Association des Communes Suisses (ACS) soutient le Fonds pour les routes
nationales et le trafic d’agglomération. Gustave Muheim, vice-président de
l’ACS, dit pourquoi la poursuite des projets d’agglomération est importante.
«Commune Suisse»: Qu’est-ce que les
programmes d’agglomération ont
déclenché dans le canton deVaud?
Gustave Muheim:
Le Canton deVaud, et
particulièrement l’agglomération lau
sannoise, a décidé, début 2002, de par
ticiper aux projets-modèles que propo
sait la Confédération, suite à son rapport
de décembre 2001 sur les effets de l’ar
ticle 50 de la nouvelle Constitution fédé
rale. Le projet-modèle, partiellement
subventionné par Berne et par l’Etat de
Vaud, aura permis à Lausanne Région de
mettre en place une large agora de ré
flexion sur plusieurs théma
tiques, dont l’aménagement
du territoire et les transports.
Les lignes directrices du pro
jet étaient le fait des commu
nes et non des instances
supérieures. Cette manière de
procéder aura permis en 2005
à l’association régionale et
aux membres des exécutifs
partenaires de rentrer de plain-pied dans
le programme d’agglomération, mé
thode proposée par le Conseil fédéral,
en réponse au refus en votation popu
laire de son contre-projet «Avanti». Pour
le programme précité, le périmètre con
cerné a été élargi aux communes de la
région morgienne, tout en mettant en
place un cercle concentrique autour de
Lausanne et de Morges. Cette procé
dure, voulue par les services cantonaux
et appuyée par l’Office fédéral du dé
veloppement territorial, ARE, a eu pour
effet d’exclure du champ d’action cer
taines communes; 10 sur 29 membres
de Lausanne Région. Le motif invoqué
était la rupture du tissu urbain continu.
Avec le recul, on peut affirmer que cette
restriction était une erreur, et l’ARE s’en
est rendue compte lors de l’analyse des
projets de 2007, dits de 1
re
génération.
Quant à la gouvernance, elle a été con
fiée aux représentants du Conseil d’Etat,
l’ARE exigeant un interlocuteur unique
pour chaque projet d’agglomération.
Et aujourd’hui?
Aujourd’hui, alors que les spécialistes
travaillent d’arrache-pied sur les projets
de 3
e
génération, dont le dépôt auprès
de l’ARE est actuellement fixé à juin
2016, on peut affirmer, sans crainte de
se tromper, que le fait d’avoir initié, en
2002, un projet-modèle est le facteur
déclenchant d’une collaboration de haut
niveau entre les communes, et pas seu
lement celles avec lesquelles elles ont
des frontières communes. L’esprit ré
gional en ressort renforcé.
Combien la Confédération, les cantons
et les communes paient-ils pour les
programmes d’agglomération?
Vouloir répondre précisément à cette
question relève de l’utopisme. Si les
chiffres de la Confédération sont
clairs – 6 milliards, dont
2,56 milliards pour des projets
urgents définis avant 2007 –,
la part des cantons et des
communes varie fortement
d’un projet à l’autre. En 2010,
l’Assemblée fédérale a libéré
1,51 milliard pour les projets
de 1
re
génération (2007). En
2014, ce sont 1,7 milliard qui
ont été libérés pour les projets de
2
e
génération (2012). Aujourd’hui, alors
que les travaux sont en cours pour la
3
e
génération, force est de constater qu’il
ne reste guère plus de 200 millions dans
le Fonds d’infrastructure fédéral.
Sachant que la subvention de Berne peut
atteindre, pour un projet 100% parfait
aux yeux de l’ARE, le 50% des
coûts, inutile de se voiler la
face; sans FORTA, la plupart
des projets qui seront pré
sentés en 2016 relèveront du
rêve, la triste réalité financière
reprenant le dessus: point
d’argent, point de Suisses, disaient nos
mercenaires aux rois de France.
Essayons tout de même de poser un
chiffre global pour les projets de 1
re
et
de 2
e
générations: lorsque la Confédéra
tion met 1 franc, les cantons et les com
munes, prises dans leur ensemble, en
mettent 4. Ceci équivaut à un total de
7,5 milliards pour la 1
re
génération et de
8,5 milliards pour la 2
e
génération. Mais
il y a un autre chiffre, parfaitement mé
connu, qui concerne principalement les
communes: c’est celui issu du coût des
équipements en sous-sol qu’il faut rem
placer, par exemple pour recevoir des
rails de trams, et celui des aménage
ments de la voirie; trottoirs, pistes cycla
bles, plantations, etc. Dans certains cas,
la part des coûts à charge des commu
nes passe du simple au double.
Pourquoi est-ce que la continuité
des programmes d’agglomération est
importante?
La Suisse souffre d’un retard phé
noménal dans ses infrastructures, qu’el
les soient destinées aux transports col
lectifs ou individuels. Quant à celles
relatives à la mobilité douce, elles n’en
sont qu’à un stade embryonnaire. Il ne
faut pas vouloir chercher ici un respon
sable; nous sommes dans un pays qui a
vu sa croissance en habitants et en em
plois exploser ces vingt dernières
années, alors que les finances publiques
étaient au plus mal. La concentration de
cette situation est particulièrement mar
quée dans les agglomérations, qui ne
doivent pas seulement répondre aux
besoins de leurs habitants, mais de tous
ceux qui viennent journellement y tra
vailler ou vaquer à leurs occupations.
Nombre de nos agglos voient leur popu
lation active doubler le matin, pour se
rétablir le soir. Les programmes d’ag
glomération et un financement solide,
et pas seulement subsidiaire, de la Con
fédération sont indispensables si nous
voulons répondre aux aspirations légiti
mes des personnes vivant
dans notre pays. A défaut,
c’est exposer la société aux
extrémistes de tous bords, qui
seraient les seuls gagnants
d’une absence de vision poli
tique des besoins financiers.
FORTA est une bonne réponse à ce pro
blème.
Interview: pb
Gustave Muheim
Gustave Muheim
est syndic de Bel
mont-sur-Lausanne
et vice-président de
l’Association des
Communes Suisses.
«L’esprit
régional
a été
renforcé.»
«Sans
FORTA, la
plupart des
projets
relèveront
du rêve.»