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NOTICE

SUR

L’HOPITAL COMMUNAL DE COPENHAGUE

E X T R A I T }

DES ANNALES D’HYGIÈNE PUBLIQUE ET DE MÉDECINE LÉGALE, 2e SÉRIE, 1866, T. XXVI. Journal rédigé par : MM. Andral, Bergeron, Boudin, Brierredc Boismont, Chevallier, Delpech,Devergie, Fonssagrives, TiGallard, Gaullicr de Clau- hry, Guérard, Michel Lévy, Môlicr, Pr. do Pietra Santa, Z. Houssin, Ambr. Tardieu, Max. Vernois. Avec une Itevue des travaux français et étrangers, par M. le docteur Beaugrand. Public depuis 1820, tous tes trois mois, pur euhierdo 250 pages urec planche». PRIX DE L’ABONNEMENT ANNUEL : Pour Paris : 18 fr. par an. — Pour les départements ( franco ) : 20 fr. On s'abonne à Paris . chez J. -B. B aillière et F ils , 19, rue Iluutefcuille.

P*ri». — Imprimerie de £. Msniirir, u:r Vigner. 2 .

NOTICE SUR L’HOPITALCOMMUNAL

COPENHAGUE

»E. l e Ur M ax ime VJHRNO IS ,

Membre de l’Académie impériale de médecine, médecin de l’Hôtel-Dieu. Membre du Conseil d’hygiène publique et de salubrité , Médecin consultant de l’Empereur, Associé étranger de la Société royale de médecine de Copenhague, Officier de la Légion d’honneur, de l’ordre de Danebrog, etc.

J.-B. BAILLIERE e t FILS

UDtlAIBKS DE L’ACADÉMIE IMPFBIAIE DE MÉDECINE

Hue Hautcfeuillc, 19.

1866

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NOTICE SUR L’HOPITAL COMMUNAL DE COPENHAGUE

La question de l’hygiène et de la construction des hôpi­ taux étant toujours à l’ordre du jour, il semble du devoir de chacun de publier les documents qu’il croit capables de l’éclairer et de la résoudre. Le livre si remarquable de M. Armand Husson sur les hôpitaux (1862); celui de MM. Blondel et Ser sur les hôpitaux civils de Londres (1862) et le Traité des maternités de M. le docteur Lefort (1865) ont mieux que d’autres avant eux ouvert la voie dans cette nature de recherches et appelé le concours des méde­ cins à l’œuvre que ces auteurs ont si profondément étu­ diée. Dans les nombreux voyages que j ’ai faits, soit à l’étranger, soit en France, j ’ai noté avec soin l’ensemble et les dispositions particulières de tous les grands hôpi­ taux et hospices. J’avais surtout remarqué, dans le Nord, l’hôpital Saint-Jean de Bruxelles, le Grand hôpital de Cologne, celui de Hambourg, celui de Rotterdam, mais aucun de ces établissements ne m’avait paru réunir la majorité des conditions qu’on est presque en droit d’exi­ ger en pareille circonstance. Il y avait cependant déjà, à Rotterdam et à Zurich, des améliorations de détails con­ nues aujourd’hui et dont quelques-unes ont été appliquées chez nous dans la construction, soit de l’hôpital Lariboi-

G

M. VERNOIS siôre, soit des nouveaux et superbes hospices créés naguère par la ville de Paris. L’an dernier, me trouvant en Dane­ mark, il m’a été donné de visiter le Grand hôpital commu­ nal de Copenhague, ouvert le 1er septembre 1863, et édifié d’après des plans étudiés pendant près de dix années. J ’y ai rencontré un ordre et des dispositions si bien entendues que j ’ai cru devoir, dans l’intérét de la science hygiénique, en publier aujourd’hui tous les détails. L’hôpital communal de Copenhague ( Kommuneliospitalet) est situé dans un des faubourgs de la ville et dans une position qui lui permet de recevoir abondamment et sans entraves l’air et la lumière. La superficie du terrain qu’il occupe peut être évaluée à environ 76 000 mètres carrés; sa longueur est de 330 mètres, sa largeur de 230 mètres, de telle sorte que sa forme géné­ rale a l’aspect d’un immense rectangle. La grande façade de l’hôpital a pour exposition le sud-est. Dans le plan général réduit que je donne ici (voy. pl. I), cTiEa 0 -v

•il.

A. Administration. B. Salles de femmes, C. Salles d’hommes. D. Cuisines.

E. Iinins. F. Buanderie. G. Machine à vapeur

A

librairie leJ.B.Baillière etfil? à Pans-

librairie deJ B.Baillière etFils à Paris

NOTICE SUR L’HÔl'lTAL COMMUNAL DE COPENHAGUE.

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M. Salle des morts, — autopsies. N. Ecuries. O. Glacière. h \ Jardin pour les maladies contagieuses. j ’. Jardin pour les aliénés. k’. Jardin du chirurgien en chef. k”. Serre. V. Jardin de l’inspectrice de la lingerie. rn\ Jardin de l’inspectrice de la buanderie.

b\ Jardin du directeur. c'. Jardin des femmes. d'. Jardin des hommes. e.\ Potager. II. BMiments des aliénés. I. Maladies contagieuses. K. Chirurgien en chef. /”. Jardin des femmes syphilitiques. y . Jardin des hommes syphilitiques.

L. Inspecteur, directeur. Les mesures sont en aunes danoises ; une aune fait en mètres français 0",03.

on peut se rendre compte de la disposition des principaux services au centre desquels je pénétrerai bientôt. L’hôpital est bâti en briques et ciment, la pierre meu­ lière et la pierre de taille manquant en Danemark et ne pouvant être transportées qu’à des frais considérables. Toutes les salles de malades sont parquetées, soit en chône, soit en sapin de Norwége. On peut y recevoir 800 malades dans quatre services par­ faitement isolés les uns des autres. 1° Médecine (hommes, femmes et enfants). 2° Chirurgie (hommes, femmes et enfants). 3° Maladies dites contagieuses. Syphilis et maladies de la peau (hommes et femmes). ha Aliénés (hommes et femmes). Tout l’hôpital est entouré de jardins (voy. pl. II), et les espaces qui séparent les divers bâtiments sont également occupes, soit par de larges allées bordées d’arbres, soit par de vastes cours et jardins. On verra plus loin que la cour centrale, encadrée dans quatre ailes de bâtiments, ne donne jour à aucune salle de malades : les deux ailes latérales ne renferment que des chambres à un lit et reçoivent l’air du côté des cours ouvertes. Le rez-de-chaussée ou le premier étage, élevé à dix marches au-dessus du sol et dont on peut suivre toutes les divisions sur la planche 111, comprend : A. Les quatre ailes. (Les chiffres inscrits dans le texte entre parenthèses correspondent aux chiffres inscrits sur

1 0 M. YERNOIS. rétablissement, ainsi que la vapeur aux cuisines. Elle est de la force de huit chevaux. Il existe encore une autre machine de trois chevaux, placée dans la buanderie et destinée au service du lavage du linge. Chambre du chauffeur (71); cabinet pour le charbon de terre (72); cabinet d’aisances (73). K. Ecuries: Écurie pour six chevaux (74) ; remises (75) ; chambres des garçons d’écurie (76); chambre pour les har­ nais (77). L. Habitation du médecin ou du chirurgien en chef (78). M. Logement du directeur de l’hôpital (79). Le second étage (en réalité le premier) (voy. la plan­ che IV), comprend : A. Dans les quatre ailes, les salles de malades 410 lits (1); les salles à 5 lits (2) ; les salles à 2 lits (3) ; les salles «44 lit (4) ; la chambre de l’infirmier ou de l’infirmière (5); la chambre de débarras (6); la salle pour les examens parti­ culiers des malades, spécialement pour les femmes (7); le chauffoir (8); les cabinets d’aisances (9) ; les bains particu­ liers, près des chambres des malades (10) ; les tuyaux de ventilation (11) ; les salles de réserve ou de rechange, pour les malades (12). B. Locaux destinés aux opérations: Salle d’opération et amphithéâtre pour les élèves (13); salle de dépôt des instru­ ments et appareils (14) ; salle pour les opérés, à 2 lits (15) ; pour les opérés, â 1 lit (16) ; chambre de l’infirmier ou de l’infirmière (17); chambre de débarras (18); chauffoir (19); salle d’électrisation avec tous les appareils nécessaires (20); musée pathologique et normal (21); chambre des in­ ternes de garde (22) ; cabinets d’études pour les élèves (23). C. Au-dessus des cuisines: Logement de l’intendant (24); chambre de débarras (25) ; salle pour la distribution des aliments (26); logement de la femme économe (27) ; loge­ ment du machiniste (28); dortoir pour les filles de cui-

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sine (29); chambre de la cuisinière en chef (30) ; chambre de l’inspecteur (31). D. Au-dessus des cellules des aliénés: Chambres particu­ lières pour hommes (32) ; chambres particulières pour femmes (33); chambre de l’infirmier ou de l’infirmière (34); chambre de débarras (35) ; cbauffoir (36) ; bains parti­ culiers (37) ; garde-robe-vestiaire (38) ; cabinets d’ai­ sances (39). E. Bâtiment des maladies contagieuses: Salles des malades pour 3 hommes (40); salles des malades pour 3 femmes (41); chauifoir (42) ; bains particuliers (43) ; chambre de désin­ fection (44) ; cabinet d’aisances (45) ; chambre de l’infir­ mier (46); chambre de débarras (47). Le troisième étage enfin (en réalité le deuxième) (voy. la planche V) renferme : A .Dans les quatre ailes: Salles de malades à 10 lits (1); salles à 5 lits (2); salles 4 2 lits (3); salles à 1 lit (4) ; chambre de l’infirmière (5); chambre de débarras (6); bains particuliers (7); salles d’examen des malades (8); chauifoir (9); tuyaux de ventilation (10); cabinets d’ai­ sances (11); salles de réserve ou de rechange pour les malades (12). B. Partie réservée à l'exercice du culte: Temple ou cha­ pelle (13) ; cabinet pour le pasteur (14), et près de là cham­ bres des médecins sous-chefs (15) ; chambre de réserve pour un interne (16); chambre pour un commis de bureau (17); chambre et cuisine du domestique des médecins (18). G. Au-dessus des cuisines: Chambres pour la distribution des aliments (19); chambres pour les filles et les garçons de cuisine (20); chambre pour l’horloge (21); garde-robe-ves­ tiaire (22); chambre de débarras (23). Pour ceux qui ont l’habitude et l’expérience pratique du fonctionnement et de la disposition des hôpitaux, jusque dans leurs plus petits détails, il sera facile de se rendre

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M. VERNOIS. compte des avantages nombreux et incontestables que pré­ sente l’hôpital communal de Copenhague. Tout le service intérieur se réduit à la réception et la sortie des malades, à la distribution régulière et à l’enlève­ ment du linge, à la répartition des tisanes et des médica­ ments et à celle des aliments. Ce service est fait à l’aide de machines ascendantes et descendantes mues à la main qui portent, à chaque étage, tout ce qui est nécessaire. A leur sortie delà plate-forme, les objets sont placés sur des cha­ riots à larges roues, bordées de cuir ou de caoutchouc, et conduits ainsi sans bruit et sans fatigue dans chacun des oflices qui précèdent chaque salle de malades. O 11 ne ren­ contre donc jamais, dans les escaliers de l’établissement, ni porteurs de linge, ni porteurs de pots de tisanes, si in­ commodes dans la plupart des autres maisons de ce genre. On aurait pu faire circuler les chariots sur des rails, mais il en serait résulté plus de bruit communiqué pour les ma­ lades, et dans quelques cas des obstacles réels à la libre circulation de la voie. Un certain nombre de malades re­ doutent ce mode de transport, et sont alors conduits aux salles sur des brancards. Les salles et toutes les pièces étant chauffées par l’air chaud et neuf injecté par la machine, on ne voit, pendant le temps froid, circuler aucun convoi de bois ou de char­ bon. L’hôpital est partout éclairé par le gaz que lui fournit l’administration de la ville. C’est peut-être en vue de ce fait qu’on a accordé une large mesure au cubage de l’air des salles. Chaque salle a deux becs, dont l’un est fermé à huit heures du soir, et dont l’autre, diminué dans son intensité à partir de ce moment, est éteint à dix heures. Les corri­ dors seuls demeurent éclairés pendant la nuit. L’eau fournie par la ville est distribuée à tous les étages, et dans chaque quartier sont disposés des lavabo pour le

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service des malades valides. Cette eau est de très-bonne qualité. En voici l’analyse qu’a bien voulu en faire mon sa­ vant collègue de l’Académie de médecine, M. Robinet, sur un échantillon que j ’ai rapporté de Copenhague. (Titre hydrotimétrique 33 degrés.) Bouillie pendant quelques minutes, elle ne titre plus que 11°,50. Pour un litre (1000 grammes : Acide carbonique libre..................... 5 centira. cubes. 0«r,352 A peine de traces de sulfates : un peu de matière orga­ nique, pouvant provenir du bouchon de la bouteille. Cette eau ne vaut ni celle de la Seine, ni celle de la Dhuys, mais se rapproche de celle de l’Ourcq, qui a en moyenne 37° à l’hydrotimètre. Les conduites d’eau sont placées assez profondément dans le sol ou dans les murs pour qu’elles n’aient jamais à souffrir de la gelée . Cette'eau provient des sources qu’ont fait jaillir un grand nombre de puits artésiens forés non loin de Copenhague, dans les environs du lac Damhunssoën. La multiplication des salles, leur fractionnement partout en chambres de 10, de 5, de 2 lits, et en chambres d’un seul malade, s’oppose d’une façon presque absolue à l’encom­ brement et à tous ses effets incommodes ou pernicieux. Je n’ai perçu nulle part de mauvaise odeur. Il est peut-être à regretter qu’on n’ait pas disposé les salles de 10 lits, dte façon à opérer très-rapidement et aussi souvent qu’on l’eût voulu, le transfèrement de tous les lits, d’un point dans un autre. Pour cela faire, on n’aurait eu qu’à diviser en trois Carbonate de chaux......................... 0sr,244 Chlorure de calcium......................... 0*r,025 — de magnésium................... 0&r,083

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M. VERNÜIS. parties la portion des pavillons consacrée à ces salles. La médiane, servant de passage, et formant corridor, eût séparé les deux autres, dont la paroi interne eût été formée par des cloisons épaisses, mais mobiles l’une sur l’autre. 11 n’y aurait eu de lits que d’un seul côté, et chaque lit eût été placé sur des rails allant d’une salle à l’autre. En cas de déplacement total des lits pour assainissement ou nettoyage de la salle, on eût ouvert successivement chaque cloison mobile derrière chaque lit, et en quelques instants la per­ mutation aurait été opérée. En cas de mort d’un malade, le lit passait de suite dans le corridor et l'enlèvement du corps se pratiquait en dehors de la vue des autres malades. Une semblable disposition devra toujours être recommandée partout où elle pourra être établie. Car elle donne à la célé­ rité et ù certains besoins du service une facilité particulière d’exécution, tout en respectant le repos des malades. r — La disposition des lieux d’aisances, leur multiplication peu ordinaire pour des besoins restreints, est une des princi­ pales raison de salubrité de l’établissement. Ils sont tenus à '-line distance convenable des salles et placés dans des con­ ditions de section des courants d’air remarquablemen exécutées. Ce détail de la construction a été parfailemen étudié. Une ventilation constante y est ménagée et la quan­ tité d’eau destinée à leur usage est considérable. Le système général du renouvellement de l’air dans les salles est celui de la propulsion mise enjeu par la machine à vapeur, qui exécute de 1500 à 2500 tours par minute, mais il est puissamment aidé par les courants d’air des croi­ sées opposées h de larges portes, donnant sur de vastes corridors ventilés eux-mêmes par des ouvertures allant du plancher au plafond. » En jetant un coup d’œil attentif sur les dispositions géné­ rales et spéciales de ce grand établissement, on doit surtout signaler:

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Au rez-de-chaussée, la chambre où se pratique le nettoie­ ment du malade et où un grand bain peut lui être admi­ nistré toutes les fois que cela est jugé necessaire. Dans 1 a bâtiment des bains, les salles de repos et de désha- billement des malades. Dans la buanderie , les locaux affectés h la désinfection des linges et des vêtements; le lieu réservé au dépôt des objets désinfectés. Partout des chauffoirs, de vastes jardins et promenoirs couverts, pour chaque classe et chaque sexe de malades. Dans la maison dite des morts, la salle de réunion des parents et amis pour le convoi. Pour les médecins , le laboratoire spécial qui leur est con­ sacré près de la pharmacie ; les cabinets de consultation dans chaque division; la salle d’électrisation, le musée d’instruments et de pièces d’anatomie normale et patholo­ gique. En Angleterre et dans presque tous les grands hôpi­ taux d’Allemagne et de Belgique, on peut voir de sem­ blables musées. Rotterdam en offre un beau spécimen. Enfin, dans les cuisines, tout le service fait à la vapeur. On n’y voit ni bois ni charbon. Un modèle en ce genre existe au Grand hôpital de Cologne : toutes les bassines de cuivre, à double compartiment, sont enveloppées d’une cage d’osier, afin de prévenir les brûlures par contact, fréquentes là où cette précaution n’est pas usitée. Le service des malades est fait par des laïques, ce qui a rendu aux besoins de l’hôpital l’espace habituellement réservé au logement des sœurs de charité, c’est-à-dire à la communauté. Les Danois pratiquant le culte évangélique, cela explique le peu d’étendue donnée au temple : et la simplicité de ce culte s’accorde parfaitement de l’espace restreint qui lui est accordé, comparativement à la place saillante qu’occupe toujours une église ou une chapelle dans les pays catholiques.

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M. VERNOIS. J ’ai regretté cependant de ne pas voir, à la suite des salles de 10 lits, une chambre réservée pour le réfectoire des convalescents. Cette excellente mesure avait été mise pen­ dant quelque temps en pratique à l’hôpital Saint-Antoine de Paris vers 18â8-18â9. L’administration n'a pas cru devoir la maintenir, et plus tard ont été dans ce but, créés les deux grands asiles de convalescence de Yincennes et du Vésinet. Partout ailleurs, cependant, quand on n ’a pas les ressources du département de la Seine, à tous les points de vue , c’est une amélioration à introduire dans le régime ordinaire des hôpitaux. Elle existe dans quelques-uns de nos hôpitaux militaires de France et à l’infirmerie de Black- burn (Angleterre). Toutes ces excellentes dispositions de l’hôpital communal de Copenhague, dues il est vrai de le dire, aux récents pro­ grès de l’hygiène hospitalière, manquent en général dans nos grands établissements, et l’on ne saurait méconnaître ni leur utilité ni leur opportunité. Cet hôpital, dont la population est environ de 800 ma­ lades, offre comme partout où ont été édifiés des établisse­ ments semblables (Hambourg, Bruxelles, Zurich), quelques inconvénients à côté de leurs avantages. On peut citer parmi eux la réunion et l’agglomération d’un grand nombre de malades d’âge et de sexes différents, atteints d’affections de natures très-diverses. Mais à Copenhague surtout, si l’on excepte le mélange accidentel des enfants avec les adultes (au moins dans les salles de chirurgie), ces inconvénients sont bien atténués, quand on songe à l’étendue qu’occupe la surface de l’hôpital et à l’intelligence qui a présidé à l’isolement réel qui sépare les aliénés des syphilitiques, ceux-ci des maladies de peau fébriles ou apyrétiques, et les maladies chirurgicales des affections médicales proprement dites. Voici comment sont habituellement répartis les malades.

NOTICE SUR L’nÔPITAL COMMUNAL DE COPENHAGUE. Chirurgie : hommes..............................: ............... 60 lits. — femmes................... 60 — enfants.................................................. 24 Médecine : hommes................................................ 120 — femmes................................................. 120 — enfants.................................................. 48 432 Syphilis et maladies de la peau : Hommes.......... 100 lits. Femmes.............................. . . . ............................ 100 Environ 20 pour 100 pour les enfants.

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Restent 150 lits, qui occasionnellement sont applicables aux différents services (aliénés, malades agités, variole). Mais ordinairement tous les lits sont occupés. Le service chirurgical est fait par M. le docteur Wi- thuysen. Le service médical par MM. les docteurs Rawn et Aarestrup. Les salles consacrées à la syphilis et aux mala­ dies de la peau sont confiées àM. le docteur Engelsted Voici le tableau général de la mortalité en 1864, pour chacun des services (du l or janvier an 31 décembre 1864). 1 °Enmédecine: A. Service de M.Rawn : Mortalité de 15,5 pour 100 ou 1 mort sur 6,4 malades; — B. Service de M. Aarestrup : Mortalité de 16,9pour 100 ou i mort sur 5,8. 2° En chirurgie : Service de M. Withuysen : Mortalité de 4,4 pour 100 ou 1 mort sur 22,6. 3° Maladies contagieuseset de la peaw: Service de M. Engel­ sted : Mortalité de 0,5 ponr 100 ou de 1 mort sur 193. Je sais tout ce que peut avoir d’incomplot et d’insuffisant un pareil document, sans qu’il soit fait mention delà nature des maladies traitées, des âges, des sexes, des circonstances météorologiques, etc. Mais je le donne tel, parce qu’il a néanmoins une valeur réelle, surtout quand on le met en regard avec un tableau semblable relatif : 1° A l’hôpital royal Frédéric, de Copenhague, situé au centre de la ville et dont les conditions de salubrité sont inférieures à celles de l’hôpital communal. ( Médecin, M. Dahlerup; chirurgien, M. Buntzen.) M. VERNOIS, 2

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M. VERNOIS.

En 1862, mortalité : Médecine...........1 sur 11,2 |

Chirurgie.....1

sur 16,6

En 1863 :

Médecine...........1

sur

8,2 |

Chirurgie... 1

sur 14,8

En 1864 :

Médecine...........1 Chirurgie . . . . 1 sur 13,9 2° Aux hôpitaux de Paris, pendant la même année 1865 : Mortalité moyenne des services : Médecine. . . . 1 sur 7,53 | C h iru rgie.... 1 sur 17,61 Et j ’y ajoute cet autre renseignement de 1855 1861 : Médecine. 13,52 pour 100. | Chirurgie. 5,48 pour 100. Pendant la môme période en Angleterre, hl’hôpital de Guy : Médecine. 14,08 pour 100. | Chirurgie.. 5,43 pour 100 (1). La chirurgie est évidemment plus heureuse à Copenhague que dans Paris. J ’ai relevé avec soin le nombre de mètres cubes d’air accordé â. chaque malade par heure dans les grandes et les petites salles. Il est, pour les chambres de 10 lits, de /i3. mètres, pour celles de 5, 2 et 1, de 50 mètres. En moyenne, /i7 mètres cubes par malade. Mais il convient d’observer ici que les nombreuses salles de rechange et leur chiffre toujours très-peu considérable de lits réunis, placent les malades dans des conditions excep­ tionnelles et meilleures môme peut-être que dans les cas plus rares où chacun d’eux jouit d’une quantité d’air rela­ tivement plus riche et plus abondante. On sait que le général Morin (2) a demandé 60 mètres cubes pour les malades de l’hôpital Lariboisière. M. Bous- singault, tout récemment encore (3), voudrait qu’on portât (1) Voyez Husson, Etude sur les hôpitaux , Paris, 1862, p. 242 à 270. (2) Voyez Rapport sur la ventilation et le chauffage des bâtiments du palais de justice, 1862. (3) Revue des cours scientifiques, 3e année, n° 23, p. 377. sur 8,6 j

NOTICE SUR L’nÔPITAL COMMUNAL DE COPENHAGUE. 19 ce chiffre jusqu’à 07 mètres, afin qu’on n’eût aucune odeur. En 1858, le docteur Richardson (1), à propos des projets relatifs à l’hôpital communal de Copenhague et dans un mémoire très-remarquable, qui a pour titre Hospital- Hygiène, demandait, pour chaque lit, au moins 1500 pieds cubes d’air (mesure anglaise équivalant à à2 ou à3 mètres cubes français). On voit que l’administration danoise a dépassé ce chiffre. La moyenne générale des mètres cubes d’air donnés à chaque malade, est aujourd’hui, pour l’hôtel-Dieu de Paris, de à lm,06à. Et à l’étranger, si l’on excepte quelques éta­ blissements, installés dans d’anciens et vastes couvents, ou dans des conditions tout à fait exceptionnelles (Vienne, hôpital de Wieden, 83 mètres ; Turin, hôpital Saint-Louis, 96 ; Pavie, hôpital Saint-Matthieu, 95; Milan, grand hôpital, 67; Florence, 61), on peut signaler les chiffres suivants : Hôpital de Béthanie (Berlin), pour les petites salles seulement. 50 mètr. Grand hôpital de Munich.............................................................. 49 Hospital do King’s college (Londres)............................................ 54 Hôpital de Saint-Jean (Bruxelles).................................................48 Hôpital de Rotterdam (Hollande).................................................. 34 (2) La moyenne de h 7 mètres à Copenhague demeure un chiffre très-acceptable. L’hôpital communal, dont j ’ai donné la description et indiqué les principales dispositions économiques, est dirigé par un conseil qui a pour 'président l’un des quatre bourg­ mestres de la ville. Sont membres de droit de ce con­ seil les quatre médecins en chef et l’inspecteur titulaire de l’hôpital. Les médecins et les élèves internes ne sont pas nommés par concours, mais par l’administration de l’hôpital. Les médecins et les chirurgiens en chef peuvent être remerciés à la condition d’être prévenus trois mois à l’avance. Ils jouissent réciproquement et aux mômes conditions du

(1) Sanitary Review, numéro de juillet. (2) Voyez Ilusson, toc. cil., p. 574, 575.

2 0 M. VERNOIS. droit de se retirer. Les élèves internes sont nommés pour deux ans et demi. Les médecins et chirurgiens en chef ne sont pas, en géné­ ral, professeurs à la faculté de médecine de Copenhague, mais ils sont tenus de faire des cours de clinique, auxquels sont admis tous les élèves, sur présentation de leur carte d’étudiant. La ville de Copenhague possède, outre l’hôpital commu­ nal, un hôpital militaire pour l’armée et un hôpital pour la marine. Il y a également une maternité , dont les bâti­ ments sont actuellement en réparation, sous la direction de M. le docteur Stadfelt. 11 est impossible de ne pas reconnaître dans la construc­ tion et les dispositions variées de l’hôpital communal de Copenhague un grand talent d’observation et d’application des sciences hygiéniques. Les constructions sont dues h un habile architecte, M. Hansen, et les plans en ont été étudiés par des commissions composées des membres les plus distingués du corps médical danois, sous la présidence de M. le docteur Bang, correspondant de notre Académie impériale, inspecteur général du service de santé et doyen des médecins de la ville. Qu’il me soit permis, en terminant cette notice, d’adres­ ser mes rcmcrcîments à MM. les docteurs Bock, Withuy- sen et Ilornemann, directeur des Annales d'hygi'ene de ce pays (Hygieiniste meddelelser og Betraguinger ), pour les ren­ seignements utiles et bienveillants qu'ils m’ont communi­ qués et pour l’accès facile qu’ils m’ont procuré dans les bibliothèques et musées remarquables de la ville savante de Copenhague.

Paris.— Imprimerie de E. M artinet , rue Mignon, 2.

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