A PONTARLIER (ûOUBs)
21
leurs rapports ont fait un certain bruit il y a quelques
années et l'Académie de médecine a retenti du tumulte
de leurs discussions. Car, comme au temps de Molière, les
médecins sont rarement du même avis et, ce qui doit rassurer
les amateurs de la célèbre liqueur, il s'est produit un désac
cord surprenant entre les opinions de ces messieurs.
Tandis que les uns, apportant le résultat d'expériences
d'après eux tout à fait concluantes, — accusent l'anis et le
fenouil d'être la cause des désordres cérébraux remarqués
chez les buveurs et innocentent la plante d'absinthe, — les
autres, en vertu d'expériences tout aussi concluantes, signa
lent au contraire cette dernière comme la seule coupable et
rétablissent l'anis et le fenouil dans leur innocence primi -
tive.
Lesquels ont raison? Lesquels ont tort? C'est ce que le
public se demande et ces divergences fondamentales ne sont
pas de nature à lui inspirer grande confiance dans les allégués
des uns et des autres. Au reste la manière dont se font les
fameuses expériences et les conclusions qu'on en tire sont
telles qu'il n'est guère possible de les prendre au sérieux.
En effet comment cherche-t-on à prouver les propriétés
toxiques de l'essence d'anis ou de l'essence d'absinthe? On
introduit dans un cobaye, au moyen d'injections sous-
cutanées, un gramme d'essence ; l'animal se trouve incom
modé; quelquefois il meurt peu de temps après l'opération;
la démonstration est faite et chacun doit être convaincu que
soit l'anis, soit l'absinthe est un poison dangereux. Avant de
jurer ainsi sur la parole des maîtres, il serait bon de se
rendre compte soi-même de la valeur léelle de l'expérience