LA CRISE DE LA CRIMINALITÉ ENVIRONNEMENTALE - page 54

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ÉTUDE DE CAS
République démocratique du Congo : l’exploitation illégale des ressources naturelles
La République démocratique du Congo est désignée par la
CITES comme l’un des deux pays africains les plus probléma-
tiques en ce qui concerne l’exploitation illégale des ressources
naturelles et de l’ivoire d’éléphant. Dans certaines régions,
90 % des carcasses d’éléphants sont imputables aux bracon-
niers
106
. L’ivoire prélevé constitue une monnaie d’échange
contre des armes, des munitions, de la nourriture et d’autres
instruments servant à maintenir les mouvements d’insurgés.
L’Armée de résistance du Seigneur (LRA), les milices Janjawid,
les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR),
Maï-Maï Morgan et diverses autres milices armées tuent régu-
lièrement des éléphants et des hippopotames pour leur ivoire.
Nombre d’entre eux sont directement impliqués dans le trafic
de bois, de charbon de bois, d’or et de minerais et ont participé
plus ou moins directement à des violations graves des droits de
l’homme (assassinats en masse, recrutement d’enfants soldats,
enlèvements, travail forcé, esclavage sexuel, pillage de masse et
déplacements de masse). Ces groupes armés utilisent et arment
les populations locales pour chasser les éléphants à leur place.
L’ivoire est accessible aux combattants de niveau inférieur qui
ne peuvent bénéficier des systèmes de taxation plus lucratifs
contrôlés par leurs supérieurs.
Le parc national de la Garamba est situé au nord-est du pays, le
long de la frontière avec le Soudan du Sud. La LRA et les bandes
de braconniers soudanais y font des incursions actives, ainsi que
certaines milices, d’après les braconniers locaux qui opèrent en
toute impunité dans un climat d’insécurité. La majeure partie du
parc est trop dangereuse pour y effectuer des patrouilles. Les gardes-
chasse ne peuvent patrouiller que dans le tiers méridional du parc,
au sud de la rivière Garamba
107
, et sans véhicule. En 2013, la popu-
lation d’éléphants y a chuté de 90 %, passant de 22 000 à environ
2 000 têtes. Le parc abritait les dernières populations sauvages de
rhinocéros blanc du Nord avant qu’elles ne soient décimées dans
les années 2000 par des bandes de braconniers soudanais, proba-
blement les Janjawids
108
. Se déplaçant en bandes de plusieurs
dizaines de chasseurs et de porteurs, ces braconniers, généralement
armés de fusils AK-47, chassent les éléphants dans le parc et aux
alentours
109
. La LRA, opérant sur ordre direct de son leader, Joseph
Kony, chasse les éléphants pour vendre l’ivoire aux groupes crimi-
nels transnationaux afin de s’approvisionner en armes, munitions,
nourriture et autres équipements. En 2009, le groupe a attaqué le
siège du parc, tuant 17 de ses employés
110
. Selon les troupes ougan-
daises, la LRA serait également à l’origine des caches contenant des
défenses d’éléphants découvertes en République centrafricaine
111
.
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