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C’est étrange et complexe, misérable et comique et redoutable, et profondément

triste.

Dés que je m’éloigne, il redouble la mise…

*19-1-2001, Auroville :

Mission accomplie. C et moi sommes arrivés hier en fin d’après-midi.

Presque tout de suite, une fois les bagages rangés, C a retrouvé son visage

d’Auroville, cette dimension qui lui a tant manqué : c’est une joie de le voir.

Selvam nous attendait à l’aéroport, mon doux Selvam, et depuis ce moment

jusqu’à maintenant, j’ai entendu le récit des conflits et péripéties de ces dernières

semaines…

Tout l’être physique n’est pas encore rassemblé ; c’est une impression curieuse,

comme une mère qui n’aurait pas encore retrouvé et rassemblé ses petits, après

une longue randonnée…

Certaines des nouvelles qui me concernent personnellement sont un peu

troublantes : il y a évidemment un courant d’insinuation et de rumeur qui est

chargé de l’intention de me faire quitter Auroville ; l’une de ces rumeurs, qu’un

Luca tout embarrassé m’a rapporté, est que j’aurais eu récemment des activités

homosexuelles sous le Banyan de Matrimandir !

Les effets dévastateurs du cyclone qui a eu lieu juste une semaine après mon

départ, bien que Selvam, Bhaskar, Paramashiva et Ar.salam aient travaillé des

semaines à tout déblayer et élaguer, sont bien visibles et sensibles dans tout le

jardin, et particulièrement près de la maison.

Les choses, en termes de conflits et de polémiques, ne semblent guère avoir

changé au Matrimandir, sinon que, pendant mon absence, Ramalingam a renforcé

sa position sur le site.

Dans un sens, je me sens soulagé de deux tâches que j’avais à cœur d’accomplir :

celle de veiller sur C et de la raccompagner ici au moins une dernière fois, et celle

de persister jusqu’à la publication de mon texte.

Et de ce point de vue, je pourrais maintenant m’en aller – quitter le corps.

S’il y a une suite, il faut que je parvienne à me réconcilier avec des données que je

ne comprends ni n’accepte bien…

Maintenant, je sens le besoin d’une période d’assimilation ; il y a une charge de

sens que je n’ai pas encore pu intégrer, comme une montagne trop grande, trop

formidable pour être gravie…

*20-1-2001, Auroville :

J’avais oublié cette sensation de cordes tendues…

Je ne sais pas où me diriger : il faut que je laisse la direction venir, du dedans…

Note : Pendant son séjour à l’hôpital, probablement dans les jours qui ont suivi

l’opération, un virus s’était logé dans les poumons de C ; la pneumologue qui la

suivait s’en était inquiétée, mais C était alors dans un service post-opératoire où

elle était censée récupérer suffisamment pour pouvoir rentrer chez elle, non dans

un service équipé pour traiter des « maladies pulmonaires », et aucun symptôme

vraiment alarmant ne s’était déclaré.