DOSSIER FAMILIAL
93
L’AVIS D’EXPERT
Sophie AUCONIE
Députée de l’Indre-et-Loire et vice-
présidente du Comité national de l’eau
“
Nous ne sommes pas tous
logés à la même enseigne
“
Je déplore que l’eau potable ne soit pas de même
qualité dans tous les territoires. Dans certaines
communes, elle est excellente, car elle provient
de nappes souterraines préservées ou passe par
un traitement de qualité. Dans d’autres, qui ne
peuvent assurer qu’un traitement plus limité, l’eau
est captée dans des cours d’eau contenant des
traces de perturbateurs endocriniens. Ces derniers
sont devenus un vrai sujet de préoccupation
qu’il devient prioritaire de traiter en amont. Autre
source d’inquiétude, la multiplication des épisodes
de sécheresse dans certaines régions. Comme
le volume de la ressource en eau se réduit, les
nappes voient leurs concentrations en polluants,
notamment en pesticides, augmenter. Cela pose
aussi le problème de la consommation d’eau
potable pour des usages tels que le lavage des
voitures ou les chasses d’eau.
F
L’EAU DU ROBINET
PEUT-ELLE ÊTRE ÉPARGNÉE
PAR LA POLLUTION ?
L’industrie ne cesse d’inventer de nouveaux
pesticides, plastiques ou médicaments.
Leurs résidus passent dans les cours
d’eau, au point que les médias relaient
régulièrement des études montrant
l’impact de ces pollutions sur la faune
aquatique. Naturellement, chacun s’inquiète
de les retrouver au robinet.
« C’est une
préoccupation mondiale majeure,
reconnaît
le Pr Yves Lévi.
Aucune eau de surface n’est
épargnée. En moyenne, les eaux souterraines,
qu’elles soient distribuées au robinet ou en
bouteille, sont moins contaminées, mais c’est
de moins en moins vrai. »
Des campagnes
nationales de mesure sont réalisées
régulièrement par l’Agence nationale de
sécurité sanitaire de l’alimentation, de
l’environnement et du travail (Anses) pour
surveiller ces polluants émergents. Résultat :
leur présence au robinet est infiniment
moins importante que celle détectée dans
les cours d’eau. Les traitements appliqués
sont en effet de nature à éliminer la plupart
de ces micropolluants, même si cela
demande de plus en plus d’efforts et de
moyens. Des moyens que n’ont pas tous
les réseaux d’eau potable. Ainsi, le dernier
rapport de la Direction générale de la santé
sur la qualité de l’eau de robinet indiquait :
« 100 % des réseaux de distribution
desservant plus de 5000 habitants ont
fourni, tout au long de l’année 2015, une eau
de bonne qualité microbiologique, contre
près de 83 % des réseaux de distribution
alimentant moins de 500 habitants. »
À savoir :
en février dernier, la Commission
européenne a proposé de réviser sa directive
sur l’eau potable, entrée en vigueur il y a
plus de vingt ans. La liste des paramètres
à contrôler va ainsi s’enrichir des bactéries
légionnelles, des chlorates issus de l’eau de
Javel, des composés perfluorés dérivés du
Téflon et de trois perturbateurs endocriniens
(le 17-bêta-estradiol, le nonylphénol et le
bisphénol A). Les seuils de concentration en
plomb et en chrome seront eux abaissés
de 50 % dans un délai de dix ans.
F
LES CARAFES FILTRANTES
ONT-ELLES UN INTÉRÊT ?
Toutes les études montrent qu’elles
n’apportent pas grand-chose à la qualité
de l’eau du robinet. Elles peuvent même la
dégrader si la cartouche de filtration n’est pas
remplacée régulièrement ou si la carafe n’est
pas assez souvent nettoyée.
F
COMMENT SONT ÉMISES LES
CONSIGNES DE RESTRICTION ?
Le distributeur d’eau, la mairie et l’ARS
les diffusent par plusieurs biais: presse
locale, affichage, haut-parleur, voire appel
téléphonique, courrier électronique et
distribution de bouteilles d’eau. Difficile
d’ignorer la situation.
À savoir:
la mairie a l’obligation d’afficher en
permanence les analyses de qualité de l’eau du
robinet sur son territoire.