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FJ - … À l’heure actuelle, comment pourrais-tu situer Auroville par rapport à
l’Ashram ?
D – Je crois que ça ne se situe pas par rapport à l’Ashram, je crois que ça se situe
par rapport à Mère, par rapport à Son Travail. C’est une autre dimension de Son
Travail, si tu veux.. La relation de l’Ashram est à Mère, la relation d’Auroville est à
Mère, et le relation des deux est plutôt secondaire…
… il y a un aspect, disons d’inspiration, qui peut venir de l’Ashram, dans la mesure
où des individus y ont beaucoup évolué ; donc ils peuvent apporter, s’ils le veulent
et si la réceptivité est là. Mais Mère Elle-même ne souhaitait pas insister sur cette
relation….
FJ - … Mais comment, pourquoi Mère a-t-elle voulu Auroville, comment l’a-t-elle
vu ?
D – Elle l’a vu… de tant de manières !... Comme un lieu où les hommes pourraient
vivre en harmonie, comme un laboratoire d’évolution accélérée – comme une forge,
comme une possibilité très importante d’éviter une catastrophe… Elle l’a vu comme
une réponse à un besoin, comme un lieu pour passer, pour faire la transition à ce
qui va venir… comme un moyen d’incarner un peu le futur, d’incarner ensemble
collectivement, dans l’atmosphère terrestre… Comme un lieu libre de toute
influence, libre de se donner entièrement à l’avenir, dans toutes les activités de la
vie, dans tous les mouvements…
FJ _ Et sans aucune forme de religion ?
D – Sans religion. La religion dans le contexte d’une étude du développement de la
conscience humaine, mais rien au présent et encore moins à l’avenir…
FJ – La religion n’est qu’au passé ?
D – Oui. C’est l’expérience du passé.
…
FJ - … Je voudrais revenir sur ce terme de « rédemption »… Je me réfère à un texte
de Mère où elle dit : « Au point de vue européen, c’est (ce que représente Sri
Aurobindo) une immense révolution spirituelle qui réhabilite la matière et la
création… »… Mais si cette matière à un moment donné a été créée différente du
Divin et qu’ensuite il y ait eu lieu de la « reprendre », c’est bien un peu la même
chose ? C’est une querelle de mots à ce moment-là ?
D - … Quelquefois Mère a essayé d’expliquer pourquoi et comment il y a eu cette
séparation, en utilisant des images des anciennes traditions ; par exemple pour
illustrer ce qui peut advenir dans la conscience… quand Elle parle de l’Amour,
l’Amour qui est venu faire le joint et rétablir le contact… Le mot « réhabiliter », là,
c’est spécifiquement pour la conscience de ceux qui croient, qui ont cru à la chute
parce qu’on leur a dit que c’était comme ça… Selon cette très ancienne tradition,
l’Amour était l’aide et l’énergie du Suprême descendue tout au fond de l’inconscient
qui a commencé un lent travail de « perméation », d’imprégnation de toute cette
inconscience et qui peu à peu émerge à travers l’évolution et rétablit le contact… Et
alors cela se passe aussi dans les individus, à travers ce que Sri Aurobindo appelle
« l’être psychique »… C’est dans ce sens que l’on peut parler de rédemption…
FJ - … Mais si au point de départ il y a l’Inconscient – s’il y a cette dualité…
D – Pour beaucoup de gens qui font le Yoga, on va chercher le Divin là où Il est
« pur », c’est-à-dire tout en haut, là où ce n’est pas mélangé, où, en tous cas, on
n’a pas de peine à Le trouver… Mais alors on oublie l’autre dimension du Divin qui
est partout, qui est tout, sans Qui il n’y a rien… !
…