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Il y a ce dégoût que je ne parviens pas à dépasser vraiment, envers ce qui abîme
nos corps : c’est inacceptable !
Où sont les racines de ce conditionnement ?
Je vois tous ces êtres qui luttent pour survivre et tentent de se conformer à l’image
et au contrat… Pourquoi vivre ?
C’est un grand vide, depuis si longtemps.
Il n’y a pas d’impulsion vers – pas de transmission, pas de sens : seulement la
mesure des ravages du temps, incontrôlables, incompris.
Une seule chose aurait un sens : être capable de recevoir la Vie et la Présence
comme une pile, comme un transmetteur….
On recommence encore et encore à zéro, à tout apprendre… peut-être parce que,
tant que l’on n’est pas capable de ne vouloir que Cela, entièrement et
intégralement, on ne peut pas faire le premier pas – ou Cela ne peut pas faire le
premier pas ici, et ne le fera pas : c’est Cela qui attend !
*1-12-2000, Saint Maur :
C refait surface ; hier on l’a débranchée des moniteurs et portée dans une chambre
séparée ; elle recommence à manger. Mais les radios des poumons montrent
encore une obstruction – une conséquence de l’anesthésie générale -, et les
docteurs veulent faire une fibrilloscopie : aspirer cette poche bronchiale avec un
petit tube, sous anesthésie locale de la gorge.
Elle devrait en principe quitter l’hôpital dans quelques jours ; et là, se pose un autre
problème ! R est malade à nouveau, avec une angine ; tous les deux dans le même
appartement ? Dés que possible, je veux emmener C en Bretagne, et qu’elle ait un
vrai repos.
*2-12-2000, Saint Maur :
Hier j’ai apporté de la musique à C ; elle s’est levée deux fois.
Mais R… c’est absurde : il a pris trop de somnifères et s’est rendu misérable ; par
n’importe quel moyen, il demande plus d’attention.
Je ne sais pas qualifier cette atmosphère ; il y a là une absence presque positive ! Il
faut que je sois ouvert à Ton Aide !
*3-12-2000, Saint Maur :
C hier s’est maquillée, et nous avons marché un peu dans le couloir, puis nous
avons regardé ensemble un film à la télévision, et écouté de la musique.
R est venu et reparti seul en taxi, car j’avais eu avec lui une scène intense le matin,
qui a produit ses effets ! Nous avions convenu que je le retrouverais chez eux pour
que nous fassions ensemble des rangements et préparions l’appartement pour le
retour de C ; mais il m’attendait tout habillé pour sortir et aller chercher des
résultats d’examens sanguins ayant trait à cette grippe qu’il avait lui-même
« soignée » en prenant une forte dose de somnifères ; et il est apparu qu’il n’avait
aucune intention de se prêter à ces rangements, ni de faire le moindre effort pour
alléger l’atmosphère ; je lui ai livré mon impression qu’il ne pensait qu’à lui et que
je n’avais donc rien à faire là, et je l’ai laissé dans la rue !
Il y avait là les restes d’une ancienne charge émotionnelle, du temps de mon
adolescence, quand l’atmosphère de R m’était si pénible ; et la constatation que, si
ce n’était pour C, il n’y a rien, vraiment rien, qui m’appelle ici ; et en même temps