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Nata m’écrivit ainsi : (« Mon cher Divakat. Oui, Mère n’a pas été très bien pendant

le mois d’Août. Elle a reçu seulement les disciples les plus intimes. Maintenant Elle

est assez mieux, au point tel que j’ai pu lui lire votre lettre du 9 écoulé. Mère a dit

que pour le moment il n’est pas question de revenir à l’Ashram. C’est trop tôt. Elle

vous avisera. Elle m’a donné pour vous le sachet de bénédictions ci-joint. Je suis

content de l’arrivée de votre ami Christian. Il faut qu’il sache que maintenant c’est

très difficile d’être reçu par Mère. Avez-vous reçu ma lettre du 30 Août ? Bien, mon

ami, je vous souhaite la paix profonde. Nata. »)

Une sorte de communauté se formait, dans les ruines de ce petit château, et la

douceur de l’automne nous permit de nous préparer à l’hiver. Etablir nos rythmes

journaliers, nos tâches, un rassemblement minimal de ressources, chacun

contribuant selon ses possibilités. Ramasser le bois mort, cuire le pain, récupérer

des tissus et des vêtements chauds pour tous, nous approvisionner et nous équiper

pour quelques activités artisanales, telles furent les priorités au cours de ces

premiers mois.

Il n’y avait pas de discours particulier, pas de programme, pas de théorie, chacun

portait et partageait ses questions, ses découvertes.

Plutôt qu’une communauté définie par ses buts, ses projets, ses principes, ou un

enseignement quelconque qu’il se serait agi de mettre en pratique, c’était une sorte

de fluidité qui s’exerçait là, s’élargissait ou se concentrait au gré des rencontres,

des mouvements et des passages.

La seule référence tangible était la présence et le travail de Mère et Sri Aurobindo,

et les fragments d’expérience que certains d’entre nous avaient déjà récoltés.

Une tension persistait en moi, car il me semblait comprendre combien il était

impératif que je sache me dégager de tout attachement. Ma nature était telle que

j’entrais profondément dans les êtres qu’il m’était donné de rencontrer, ce que je

percevais comme une capacité vraie, mais l’ego et l’inconscience s’en mêlaient

inévitablement et pouvaient en dévier la portée, en corrompre l’utilité. Le plus

souvent, d’intenses attachements étaient ainsi formés, qui pesaient et secrétaient

de la douleur, comme une misère qui devenait intolérable.

Je pressentais que, avant que cette capacité puisse vraiment servir, agir au service

de la vérité, libre de tout mélange, un long travail de purification serait nécessaire –

pas une purification morale, mais une purification du poids et de l’emprise de l’ego.

Un début, au moins, de transformation psychologique.

J’étais souvent moi-même, et depuis l’enfance, la première « victime » de cette

force d’attachement, quel que soit son « objet ».

Même envers Mère.

En Novembre, j’écrivis de nouveau à Nata, pour Elle.

Le 18 Novembre, il me répondit : (« Cher Divakat. J’ai lu à Mère votre lettre du 9

écoulé. Voici sa réponse : un cœur avec sa photo et ses bénédictions. Vous faîtes

très bien à écrire avec fréquence : cela vous permettra de vous tenir dans la

conscience physique de Mère pendant les instants que je lui lise votre lettre. Elle se

souvient de vous très bien et chaque fois se concentre assez longtemps. Je me

rends compte que le grand désir qui vous domine de revenir à l’Ashram crée en

vous une sorte de complexe. Tâchez de n’y pas penser. Soyez sûr que le moment

venu, Mère ne manquera pas de me dire : Nata, écris à Divakat qu’il vienne.

L’attachement à n’importe quoi ne pourra pas vous faire du bien, mais seulement

retarder votre avancement sur le sentier de la transformation. Je me souviens de