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n’est pas la mort vraie, et où je comprend que je vais lutter et refuser et les laisser
tous à leur drame et m’en aller…
… Je dîne se soir seul avec Barbara, qui veut savoir plus de l’histoire de mes
premières années ici, ce qui s’était passé… Pas très agréable d’avoir encore à en
parler…
… Une lettre de Diane, assez douce, mais toujours aussi évasive ; et j’ai de
nouveau de l’appréhension : va t elle encore s’opposer à mon contact avec ma
princesse ?
… C’est comme si je n’arrivais pas vraiment à passer de l’autre côté ; il y a comme
une subtile mais constante allée et venue dans un espace intermédiaire, ou bien
comme deux êtres, deux substances, deux états…
Pourtant je me sens « tenu » et j’en ai de la gratitude…
*12-1-1984, Auroville :
Rien de clair…
Je redoute le retour de Diane : qu’elle ne puisse pas faire le mouvement
d’ouverture qui me permette aussi d’être avec Auragni.
Ce soir, juste avant de nous séparer pour la nuit, Krishna a souligné pour moi ce
que je dois changer de mon côté pour que ce soit possible avec Diane : cette
position mentalisée qui en moi force la femme à se sentir « inférieure », misérable
et pas aimée…
*13-1-1984, Auroville :
Rétrospectivement toute cette période qui vient de s’écouler, pourtant habitée
d’expériences qui ont été pour moi cruciales, semble si dure : durcie, déformée par
la présence de l’ego… Le regard attrape surtout ce qui a menti, ce qui ne s’est pas
donné, ce qui a prétendu, ou s’est dissimulé dans l’intensité, ou en a profité pour
subsister sous d’autres formes…
*15-1-1984, Auroville :
Barbara est venue, avec Akash, passer un long moment ; elle souhaitait parler de
notre relation, de cette partie de moi qui rend difficile l’accomplissement toute
relation ; parler aussi de Ruud et de la direction qu’il a prise sous l’influence de
certains vieux disciples de l’Ashram qui prétendent se trouver au centre du Travail ;
et du trouble qu’elle en ressent…
… L’Auroville extérieure et sociale, l’Auroville qui s’est déjà formée, pliée, fixée,
m’apparaît si peu profonde, comme un luxe triste que rien ne justifie, une réalité
d’emprunt – et pas l’expression de la naissance d’un être nouveau…
*16-1-1984, Auroville :
J’ai la crève… Il y avait ce merveilleux brouillard après l’aurore ; une jeune Indienne
dansait des figures dévotionnelles près de l’Urne, et c’était juste…
… Je suis comme fatigué, saturé de cette fameuse « vérité » que l’on prétend
détenir ou avec laquelle on prétend être en rapport, ici…
Même, et peut-être surtout, avec Krishna… Depuis 14 ans qu’on marche ensemble,
on n’a pas encore pu simplement avoir le geste de tendresse, d’affection détendue,
donnée, qui correspond à ce que l’on éprouve vraiment… L’ « Idéal », le « But »,
ont seulement pris la relève de l’ego… !