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vibration du manque et du dérisoire, le sens insupportable d’une déviation, d’une
déformation, d’une absurdité logée dans la vie même : le phénomène de la mort !
Que la mort soit pour tous le seul fait invariable de l’expérience humaine ; que la
mort ait usurpé ce rôle de l’absolu !
Que la mort soit la conclusion identique pour tous, quels que soient les parcours,
les accomplissements, les développements, ou les défaites et les parjures !
Que la mort soit l’inévitable point final de toute aventure, déjà inscrit dans le
premier instant !
La spiritualité a semblé nous enseigner une distance et un détachement de notre
état matériel au profit d’une identification intérieure à une dimension de soi qui
demeurerait égale indépendamment du corps, qui nous libèrerait en même temps
de l’illusion de nos vouloirs de créatures séparées, nous permettant ainsi de traiter
avec le monde, pour le reste du temps de nos corps, avec une bienveillance éclairée
et une prière pour la libération de tous.
Ainsi la spiritualité a-t-elle, en principe et dans son ensemble, accepté la mort –
accepté le fait de la mort, et de la limitation de la manifestation, et l’a presque
légitimé.
Ceux qui ne pouvaient renoncer à la quête du principe de l’immortalité ont été
ressentis par l’élite spirituelle comme des ambitieux assoiffés d’illusion.
Pourtant, qu’il ait été étouffé ou détourné, mythifié ou méprisé, le débat originel se
poursuit avec une acuité plus grande d’avoir été ignoré.
Mais que comprenons-nous par « immortalité » ?
Souhaitons-nous seulement déjouer les lois de la nature physique et prolonger
indéfiniment le temps de notre jouissance égoïste et perpétuer indéfiniment notre
propre réalisation séparée ?
*2-2-2000, Auroville :
Il y a encore un tel abîme entre la vie de la matière et ce que nous éprouvons
comme notre vie. Nous mesurons cet abîme, cette distance, par nos microscopes,
nos accélérateurs atomiques, nos fusées, nos éprouvettes, nos théories ; nous
jalonnons cette distance de nos repères, nous l’affublons de nos lois, nous la fixons.
Il arrive heureusement que ces lois volent en éclats, car nos logiques ont des failles
et ne peuvent rendre compte de tous les comportements de la matière observée ;
plus nous l’observons, en fait, et tentons de pénétrer son mystère, et plus elle se
dérobe et nous force à l’implosion de notre pensée.
Il y a ceux parmi nous qui portent cette foi entièrement déraisonnable : que
quelque part dans l’être, physiquement, consciemment, se cache encore et nous
attend le secret d’un état Un.
Un état qui est à la fois matériel, pure matière, et spirituel, pure divinité.
On serait tenté de dire qu’il se cache dans nos corps ; mais ce n’est pas qu’il faille
le traquer dans la géographie interne de nos organes ou de nos veines, ni même
que sa clé soit inscrite dans tel assemblage de neurones ou qu’on puisse jamais le
déchiffrer dans la composition symétrique d’une cellule.
Il y a seulement, ou presque, la certitude que c’est là, qu’il est là, ce secret.
Et qu’il nous faut seulement développer comme une antenne chercheuse, un
nouveau sens qui nous oriente vers ce centre vibrant qui attend, une antenne toute
nourrie de notre besoin clair, de vérité, d’unité, de plénitude, et d’une Présence que
plus rien ne puisse contredire, pas même la mort.