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Dés que l’on s’implique et se situe dans un contexte particulier, quel que soit le

discernement dont nous soyons capable et qu’on le veuille ou non, on entre dans un

jeu de réponses, de réactions et d’échos qui se saisissent de notre image,

s’adressent à notre personnalité frontale et la ciblent.

Et c’est précisément là que l’on sait combien l’on a besoin de temps, d’un temps

donné et sûr, d’un temps sans mort, pour accomplir des progrès véritables, des

progrès qui s’incarnent dans la substance et la matière, des progrès qui deviennent

de réels acquis sur le chemin de la manifestation consciente.

L’on comprend profondément que la première réalisation nécessaire, à la fois

objectivement et subjectivement, pour que s’opère dans l’humanité sur la Terre le

passage à un autre Etat, est la conquête d’une durée indéfinie pour la vie du corps :

de la possibilité de maintenir l’agrégat individuel en travail aussi longtemps que

cela est centralement perçu comme bon et utile.

C’est le principe d’une victoire sur l’arbitraire de la mort.

*13-2-2000, Auroville :

Krishna a quitté son corps – ou son corps l’a quitté ?

D’après Agnès et Gopal, cela s’est passé il y a trois jours, le 10 au soir, à 23 h.

Selon eux, Krishna avait demandé à ce que personne ne soit informé avant cinq

jours, et il avait choisi l’endroit du jardin où son corps devrait être enterré.

Et ainsi, je ne l’ai pas revu.

Il a souffert. Je sais très peu, extérieurement, de sa lutte ; j’ai cru comprendre que

cela avait commencé il y a deux ans, avec un cancer du pancréas.

Une semaine avant son départ, il s’était déplacé jusque chez Ganga, pour lui

demander de l’eau dynamisée ; il n’avait plus que la peau sur les os, et des

prothèses à la place de plusieurs organes, me dit-on ; mais, comme le dit Ar., il

aura jusqu’au dernier moment voulu garder le contrôle sur ses proches – sur les

deux êtres qu’il n’avait pas encore rejetés.

Mais la « mort » de Krishna est une impossibilité : c’est absurde et imbécile !

Le pire qui pouvait nous arriver à tous les deux est arrivé effectivement, il y a déjà

combien d’années, quand cette mégalomanie en lui, associée à une forme de

terrorisme, qui l’a peu à peu écarté de lui-même, et en moi une dureté, une sorte

de petitesse ou de peur égoïste, ont fermé pour notre amour ensemble la possibilité

de se manifester en avant.

Pourtant je sais bien qu’à travers tout son choix de demeurer ici, tout près, le plus

près possible, juste au-delà d’un jet de pierre, est un avec cet amour – cet amour

qu’il nous faudra redécouvrir et retrouver autrement ; et que les autres, peut-être

tous les autres, n’y comprennent presque rien.

Tu m’as nommé. Tu l’as nommé.

Il faut marcher. Il faut que quelque chose vraiment s’établisse.

Tout cela est inacceptable.

Comment incarner cet équilibre inconnu, cette force d’équilibre consciente, cette

lucidité puissante dans la matière ?

Il faut le faire ; il faut le faire !

*14-2-2000, Auroville :

Quand on s’installe et fait sa demeure principale dans le mental – comme ces

savants qui jusque dans le métro poursuivent l’écheveau subtil de leurs équations

ou partent à la trace de nouvelles hypothèses en regardant la goutte perler sur la

vitre ou l’improbable symétrie de l’eau soulevée par la poussée du chaland dans la