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… Plus ça va, plus je ressens combien notre temps biologique est faussé, comme s’il

était une parodie d’un autre temps biologique beaucoup plus sensé qui a dû, tout

mon instinct me le dit, se manifester déjà sur la Terre (quand, approximativement,

la mesure biologique d’un de nos jours correspondait en fait à celle d’un de nos

mois). Je ne sais comment décrire ce terrible inconfort, cette sensation d’être floué,

par rapport à une sorte de mémoire vécue d’un état physique infiniment plus

praticable ; et plus je me sens physiquement précipité comme vers le

rétrécissement d’un goulot d’expulsion, de dissolution et de mort, et plus mon corps

veut dormir, comme pour échapper à cette contrainte arbitraire, à cette imposition

invalidante.

… Je réfléchis à la potentialité créative de l’imagination ; c’est en relation avec Ton

indication du pouvoir effectif de l’imagination, si elle est saisie comme une discipline

formative pour assister le progrès du yoga – tel un émissaire que l’on envoie en

avant pour dynamiser les possibles dont on a besoin pour les progrès à faire dans la

substance, ici même ; et je me demande dans quelle mesure cette discipline peut

être utilement pratiquée pour ce travail dans le corps, ne serait ce que pour

contrecarrer les effets dévastateurs de cet arbitraire presque absolu qui intervient

dans le fonctionnement des cellules et leurs relations.

*7-6-2000, Auroville :

C a téléphoné encore, pour se soulager de l’épreuve en « dents de scie » à laquelle

R la soumet constamment : R, dont le seul ouvrage publié avait pour sujet la

médecine psychosomatique, un concept encore nouveau à l’époque où il l’écrivit, et

qui se trouve maintenant précipité dans une alternance assez infernale d’états

physiologiques auxquels il s’identifie, avec, envers C, cette ambivalence active de

vouloir la tirer avec lui dans ce vortex sous le prétexte plus ou moins présentable

qu’ainsi seulement il trouvera la paix – s’ils s’en vont ensemble !

C m’a aussi suggéré que j’écrive au directeur du « Département Spiritualités » des

Editions Albin Michel, qu’A a rencontré et trouvé « très ouvert »…

… Ce matin j’ai accompagné Kusum à l’Ashram pour qu’on lui fasse une

radiographie des intestins afin de juger de la condition de cette tumeur ;

l’attendant, je contemplais l’étendue de l’Océan Indien, et j’essayais de me

représenter ce que pourrait être une sadhana solitaire, en France, peut-être dans la

maison de Bretagne, ou ailleurs ?

Car il y a ce dégoût croissant que j’éprouve envers l’obligation, l’imposition, la

violation méchante et destructrice de l’action intracellulaire que l’on appelle

« vieillissement ».

Et il y a cette distance croissante que je ressens envers les conduites, les

démarches et les pratiques qui ont cours à Auroville.

Et il y a enfin l’impasse dans le travail extérieur, à cause de la personnalité d’Arjun

qui a le besoin absolu d’avoir le contrôle – et j’ai depuis longtemps déjà choisi de lui

donner de l’amitié et de la place ; et en conséquence je me suis retiré de plus en

plus, et j’ai perdu l’enthousiasme et le contact avec l’énergie de l’action, et il s’est

produit comme une sorte d’atrophie des capacités de manifestation dont je

disposais.

Alors tout cela ensemble établit une sorte de propension vers un retrait ou un

éloignement ou un déplacement… Je ne sais pas…