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Jusqu’à présent, les choses intérieures s’organisaient toujours de telle façon que,
lorsque l’individu devenait lui-même dans sa vie comme l’écho de sa propre
question brûlante, tôt ou tard et quelle que soit sa situation extérieure, il était mis
en présence d’un signe ou d’une série de signes qui indiquaient la marche à suivre,
éclairaient l’ombre d’une solitude devenue plus absolue, et le plus souvent le
conduisaient à un guide, sous la forme d’une autre personne humaine ou, au
moins, d’un enseignement spirituel.
52.
Le monde a changé.
La force irrésistible de l’évolution a brassé l’homme dans toutes ses parts, saccagé
tous ses sanctuaires, répandu tous ses trésors, arraché de leurs voiles toutes ses
vérités exclusives qu’il abritait du profane, renversé ses idoles et détruit leurs
socles, diffusé en tous points son acquis, et démoli l’image de son bien comme de
son mal.
L’homme est réduit à son état.
Tout est là.
C’est un grand gaspillage et une grande destruction, disons-nous, essayant de
retenir les lambeaux d’une beauté passée, d’une noblesse et d’un sacré piétinés,
qui n’étaient pourtant qu’une image.
Car quand avons nous jamais vraiment vécu ? En combien d’instants avons nous
jamais été pleins ?
Nous sommes là, partout confrontés à cet incommensurable gâchis, continuant sur
notre lancée à croire aux bienfaits de telle ou telle panoplie d’un homme amélioré
dont le visage pourtant ne parvient pas à nous convaincre.
Alors, pour quoi, tout ça ?
Et l’on revient à ce seul besoin, au-dedans mais aussi partout et tout le temps.
Et l’on s’aperçoit que quelque chose vraiment est arrivé, on ne sait quand ni
comment ; mais si l’on écoute bien, si l’on se tait un peu, il y a dans ce besoin
comme un courant d’une autre nature, et il y a, en réponse, dans les plus petites
circonstances du quotidien, autour des plus minimes mouvements de la vie, ou
veillant sur les plus infimes opérations de notre conscience, comme la présence ou
le regard d’un état autre, d’une continuité, ou d’un continuum conscient.
53.
Quelque chose que peut-être l’on peut apprendre à vérifier, quelque chose qui est
sans jugement, mais infiniment plus sûr que tous les guides, sans arbitraire, sans
origine particulière, sans identité, mais infiniment présent, constamment agissant,
quelque chose qui semble posséder le sourire secret de toute cette vaste
irréductible et flagrante catastrophe de l’homme, de tout ce parfait et impossible
piège.
Et la perception bascule.
Les forces et les énergies qui nous animent sont d’origines différentes.
L’homme en est le masque autant qu’il en est le véhicule ou l’exécutant.
La conscience dans l’homme a appris à reconnaître leur passage, à identifier leurs
natures, à éprouver les effets de leur action ; et à mesure que la confusion de
l’expérience s’apaise, cette connaissance se communique et s’universalise.