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de développement personnel dans toutes
les composantes des termes... Bien sûr le
«savoir-faire technique» est indispensable
et incontournable... Mais on se rend compte
qu’il est insuffisant. Cela est d’autant plus
vrai dans les métiers de service (au début
de leur formidable développement dans ces
années-là),quandlaposture(c’est-à-direl’in-
telligence dans sa relation à autrui) et lamaî-
trise de son contexte de travail deviennent
des ingrédients indispensables à la perfor-
mance professionnelle individuelle et col-
lective... Aussi, pour assumer cette ambition,
va-t-on voir se développer cette formation
professionnelle autour des concepts fédé-
rateurs, de «savoir», de «savoir-faire» et
celui plus ambigu, de «savoir-être»... Dans
ce nouveau contexte on observera l’émer-
gence souvent heureuse, mais quelquefois
moins, de nombreuses expérimentations
pédagogiques (dynamique de groupe sous
des formes très variées en particulier). Elles
donneront lieu à de très belles réussitesmais
aussi à quelques abus...
Cette grande loi – qui va devenir
emblématique – est en effet parée d’un titre
alambiqué:
«Organisation de la formation
professionnelle dans le cadre de l’éducation per-
manente».
Elle veut ainsi prétendre que la
formation professionnelle doit être autre
chose qu’une seule formation technique:
une véritable formation professionnelle et
Il est bien beau de «faire» de la
formation mais à quoi cela sert-il ? Après
plusieurs années de pratique de la loi, et
devant l’importance des budgets de forma-
tion (en expansion constante à cette époque
et dépassant déjà largement, dans les grandes
entreprises, l’obligation légale de 1% de la
masse salariale), s’est naturellement posée
la question du «pay back» de ces dépenses.
C’est ainsi qu’a émergé le concept «d’inves-
tissement-formation» («donner du sens à la
dépense»). Pilotes de la formation et forma-
teurs , pour être capables
de s’inscrire dans cette
démarche et pour savoir
répondre aux questions
qu’on leur posait, sont alors
allés chercher du côté des
sciences de l’ingénieur, les
réponsesméthodologiques
nécessaires, essentiellement
autour de l’ingénierie de
projet. C’est ainsi que son vocabulaire a été
repris par le milieu de la formation avec
beaucoup de succès, puisque l’ingénierie
de formation et l’ingénierie pédagogique sont
devenues très vite des «concepts» incontour-
nables (dans les entreprises et aussi chez les
organismes de formation pour la construc-
tion de leur programme). Bien évidement
le fait de maîtriser le vocabulaire ne suffit
pas et c’est ainsi que va se créer un certain
clivage entre ceux qui «parlent d’ingénierie»
et ceux qui savent la pratiquer, parce qu’ils
ont su se professionnaliser en conséquence.
La littérature va les y aider avec nombre de
Cette nouvelle loi donne également à
chaque salarié un « droit individuel à
la formation »
sans spécifier véritable-
ment les conditions et les moyens de son
exercice. Ce dernier point va avoir une
conséquence importante dans le dia-
logue social sur la formation : les repré-
sentants des salariés prônant le primat de
ceux-ci dans les choix de leur formation,
les directions d’entreprises demandant,
elles, à leur direction de la formation
d’élaborer des plans de formation en
cohérence avec leur stratégie de perfor-
mance et de développement.
Danscenouveaucontexte,quelquesgrandes
entreprises vont décider d’aller plus loin et
d’accompagner leur politique de formation
par la création de structures internes de for-
mation (appelées institut, centre de forma-
tion, université interne, campus...) capables
de construire des offres en adéquation – sur
le fond et sur la forme – avec les besoins du
management, des salariés, et dans la dyna-
mique de leur culture.
publications souvent de grande qualité. Le
métier «d’ingénieur de formation» (sous des
appellations diverses) va s’officialiser et se
distinguer du métier de formateur. Des for-
mations universitaires vont se développer un
peupartout dans des conditions de fiabilité et
d’excellence variables. La notion d’objectifs
à atteindre va se généraliser (avec la célèbre
formule « à l’issue de la formation il sera
capable de... »).
Mais assez vite le concept «d’objectif de for-
mation» va se révéler trop pauvre voire ina-
déquat.Lesdémarchesd’in-
vestissement vont mettre
en évidence que la forma-
tion est un moyen (pas une
fin en soi) et qu’elle doit se
mettre au serviced’objectifs
dont elle n’a pas vocation à
décider elle-même. Dans
le même temps, le travail
entrepris sur les notions de
«compétences» va permettre d’articuler et
de bien distinguer objectifs de la formation
(essentiellement compétences à acquérir)
et objectifs pédagogiques (construction et
condition de leur acquisition).
Naturellement, va aussi émerger la ques-
tion des résultats obtenus, c’est-à-dire de
l’évaluation de la formation. Si la mesure
de la satisfaction des participants va se
généraliser utilement, celle des effets
observés dans les situations de travail sera
beaucoup plus problématique alors qu’elle
est pourtant indispensable à la logique
même de l’investissement.
LA FORMATION
PROFESSIONNELLE
EN FRANCE
Une histoire balisée
d’événements...
La loi sur
la formation:
un titre
compliqué
mais une grande
ambition...
L’investissement-formation
La formation
est un moyen
et pas une fin
en soi
Création par la loi du congé
individuel de formation (CIF).
Il a pour objet de permettre
à tout salarié, au cours de
sa vie professionnelle et
à son initiative, de suivre
des sessions de formation
indépendamment de sa
participation aux stages
inclus dans le plan de
formation de son entreprise.
1978
Juillet
Loi dite «loi Delors»
portant sur l’organisation de
la formation professionnelle
continue dans le cadre de
l’éducation permanente,
issue de l’accord
interprofessionnel de 1970.
Elle inscrit le droit à la
formation pour les salariés
et organise les règles de
son financement par les
entreprises.
1971
Juillet
Une histoire
balisée d’événements...
Rédigé par Bernard Masingue,
partenaire d’Entreprise & Personnel