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*24-12-1999, Auroville :
Je suis repris par les vagues de confusion et de contradiction qui ne cessent de se
mouvoir ici… et ce retour sur soi de l’ego qui altère les réponses et les réduit à des
« réactions »… Avec une touche de romantisme et un brin d’idéalisme on parvient
encore habituellement à couvrir la crudité de ce retour égoïste – nous serions les
victimes héroïques d’un étouffement par le vieux monde… !
… Cet ego… est tel à ces pieuvres qui secrètent une encre obscurcissant tout le
milieu environnant dés l’approche d’une présence…
Le fait demeure pourtant que la transition est une expérience pénible, et que cela
ne peut être autrement ; c’est plus qu’une mue, et plus complexe et plus inconnu
qu’une métamorphose, car toute métamorphose est guidée, orientée et déterminée
par un modèle déjà inscrit.
Dans cette transition nous n’avons pas de modèle : les modèles, si tant est que la
biologie continue d’opérer selon les mêmes grands principes, n’émergeront que
beaucoup plus tard, car ils ne peuvent être issus qu’au travers des premières
réalisations accomplies.
Nous n’avons pour nous guider qu’un sens embryonnaire, qui devient conscient
goutte à goutte, un sens qui n’a pas de nom et n’appartient ni à la vie, ni à la
pensée, ni au corps, et cependant s’y exprime, un sens par lequel nous savons que
nous sommes au bout du fonctionnement mental et au bout de la viabilité de l’ego,
et même de la fiabilité de nos instincts de créature.
*28-12-1999, Auroville :
Je me sens comme suspendu par un fil, direct mais bien ténu, de confiance et de
prière et de réponse, dans un milieu informe où domine le sens de l’inutilité ; mes
efforts pour retracer ce séjour, cette « parenthèse », sont ainsi frappés de vanité…
Pourtant s’exerce de plus en plus cette question : comment soulever, embrasser
tous les êtres dans le progrès de conscience nécessaire ?
Une destruction au moins partielle sera-t-elle indispensable ? Qu’en sera-t-il de ces
millions, de ces milliards qui s’accrochent à la vie physique parce qu’ils ne sont
conscients d’aucune autre réalité d’existence ?
La substance est une : comment quiconque, si évolué soit-il, pourrait ignorer ne
serait-ce qu’un moment le désarroi, la souffrance ou le besoin brut de tant et tant
de corps et de formes individuels ?
N’en resterait-il qu’un, comment pourrait-on l’abstraire ?
Comment trouver et canaliser cet Acte vraiment suprême qui puisse porter dans
toute la substance assez d’harmonie et de sens pour que chaque être puisse en
éprouver le soutien et l’énergie bienfaisante ?
Tant qu’un seul être crie encore de la solitude et de l’absence, c’est soi-même qui
ne s’est pas encore réalisé !
Tant qu’un seul être éprouve le viol d’une souffrance incomprise, c’est soi-même
qui demeure obstrué, empêché de s’ouvrir à l’avenir, dans la paix solide et unifiée
qui seule peut l’accueillir.
Il semble que nous soyons prisonniers d’un cercle vicieux : le temps matériel nous
est compté, car la Terre ne peut plus longtemps supporter les ravages de notre
ignorance égoïste, dont la multiplication s’accélère ; ceux qui sont, centralement et
jusque dans le corps, les plus conscients du besoin comme de la force et la vérité
d’un Etat autre et d‘une manifestation nouvelle, sont aussi automatiquement les
plus conscients de l’unité de la substance ; ils ne peuvent faire la pas décisif, et
franchir physiquement le seuil évolutif sans le soutien d’une résonance suffisante
dans la substance humane générale à cet instant ; or, pour que cette résonance se