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concentrer ainsi sur cela même qui doit disparaître, trahir ton engagement,

légitimer ton insincérité ? Crois-tu donc connaître mieux qu’Eux la voie du

changement ? »

Je me suis toujours défié des vertueuses désapprobations…

Ce malaise, je ne le ressentais pas lorsque j’écrivais ces lignes, lorsque mon besoin

était qu’elles soient les plus exactes possible ; je ressentais au contraire le soutien

tranquille et bienveillant de la conscience, comme les mains fermes de la mère qui

soutient son petit dans ses premiers pas incertains vers la cohérence du

mouvement maîtrisé.

Mais je dois aussi m’interroger sur ce qui pourrait constituer de ma part un

aveuglement persistant : ne serait-je pas en train de prêcher une fausse ouverture,

qui n’aurait pour conséquence effective qu’un nouveau déferlement de possession

et de débauche ?

Car enfin n’ont-Ils pas expliqué, avec une indiscutable autorité, que la seule,

l’unique manière de parvenir à la manifestation physique de l’amour véritable, de la

joie certaine, de la tendresse divine, était de se libérer intégralement de toute

sexualité ?

Ne suis- je pas en train de mêler à une perspective consciente ma propre douleur et

mon propre manque d’héroïsme ?

Car, cela est certain, il nous faut sortir vivants de la sexualité, comme il nous faut

sortir vivants de la mort.

L’une et l’autre, la mort et la sexualité, sont les tenants d’une étape évolutive, qui

n’est pas celle de la plénitude, mais celle de la lutte pour l’individualisation de

formes.

La plénitude ne deviendra possible dans le monde manifesté que lorsque la mort et

la sexualité auront cessé d’être nécessaires à notre développement ; lorsque

devenues inutiles et absurdes elles tomberont de nous, se déferont et seront

désamorcées de nos organismes et nos corps.

Alors évidemment, puisque tout progrès commence par soi-même, ce qui est de

première importance et précède tout autre considération, c’est de retirer en soi-

même obstinément, avec persistance et persévérance, tout assentiment à la

sexualité comme à la mort.

Et ce que je continue de faire, c’est de moduler mon assentiment selon des rythmes

et des mélodies qui me semblent seulement plus plaisants, ou moins douloureux !

Et de justifier ma propre incapacité à m’engager et à choisir par un état de choses

collectif !

*17-1-2000, Auroville :

Mais je récidive !

C’est le mental qui, jusqu’à présent, joue le rôle d’un guide sélectif dans la

construction de nos personnalités.

C’est mentalement que nous évaluons notre propre cohérence individuelle, que

nous nous efforçons d’en combler les lacunes, de remédier tant bien que mal à nos

défauts de nature, et de nous conformer autant que possible à une image que

l’autre puisse accepter et apprécier.

Mais nous nous rendons tous compte que les bénéfices optimaux de cet exercice ne

nous permettent que de donner le change assez longtemps pour pouvoir

éventuellement, à l’abri de formes et d’habitudes plus ou moins stabilisées,

retourner à l’exploration de nous-même.